vendredi 20 octobre 2017

INFO COLLOQUE

Colloque efa 2017 :  le lundi 20 novembre 2017 de 9 h 15 à 18 h 

Thème :  « Construire un projet pour l’enfant : vers de nouvelles formes de parentalité ».
CISP – 6 avenue Maurice Ravel – 75012 PARIS 



Madame, Monsieur,

Nous avons le plaisir de vous informer du colloque organisé à Paris dans un mois par Enfance & Familles d’Adoption « Construire un projet pour l’enfant : vers de nouvelles formes de parentalité », le 20 novembre 2017.

Ce colloque peut vivement intéresser les familles d’accueil   
 La loi du 14 mars 2016  enjoint désormais de faire un projet de vie pour chacun des enfants pupilles de l'État. 
Des expériences, des idées novatrices seront explorées au cours de ce colloque, permettant d’envisager de nouveaux projets pour les pupilles de l'État.
Il s'agit, lorsque l'adoption ne semble pas réalisable, outre d'assurer leur insertion sociale et professionnelle, de créer autour d'eux un réseau affectif stable qui puisse, autant que possible, perdurer au-delà de leur majorité.
Les schémas familiaux et de parentalité se sont diversifiés : familles « PME » – père, mère, enfant(s) –, monoparentales, homoparentales, recomposées... On y trouve des parents d’enfants « faits maison », des parents par adoption, des beaux-parents, des parrains, des tiers digne de confiance...
Du côté des enfants placés, l’évolution des pratiques éducatives de ces dernières années aboutit désormais à élaborer avec eux un « projet pour l'enfant », quelle que soit leur situation juridique. Et si cette évolution était l’occasion de penser des projets familiaux « sur-mesure »  pour des enfants privés d’environnement familial stable ? Pour que chaque enfant se voie proposer le cadre sécurisant et stable d’une famille, indispensable à son développement
Vous trouverez ci-joint le programme et le bulletin d'inscription à ce colloque.
Merci de le faire suivre aux familles et ne tardez pas à nous transmettre les inscriptions si vous êtes intéressés.
N’hésitez pas  à le faire connaître autour de vous.

Très sincèrement

Marie-José Chaury
Directrice de la Fédération
Enfance & Familles d'Adoption

221 rue La Fayette - 75010 Paris
LES SÉMINAIRES THÉMATIQUES
> DE L'ÉCOLE DE LA PROTECTION DE L'ENFANCE
 
 
 
 
L'École de la Protection de l'Enfance vous propose des séminaires thématiques sur les problématiques rencontrées de manière récurrente par les professionnels de terrain:
 
- Les séminaires de l'École de la Protection de l'Enfance sont susceptibles d'être pris en charge pour la formation des élus et également par UNIFAF et autres OPCA.
 
 
 

> ►Enjeux politiques, sociaux et territoriaux de la protection de l'enfance : séminaire les 15 et 16 novembre 2017 - 340€

> ►Besoins fondamentaux et droits de l'enfant : quels enjeux pour le cadre en protection de l'enfance? Séminaire les 12 et 13 décembre 2017 - 340€
>
> ► Le travail avec les familles et l'enfant : enjeux et méthodes : séminaire les 16 et 17 janvier 2018 - 340€
 
► Parcours en protection de l'enfance : mieux évaluer pour mieux construire :séminaire les 20 et 21 février 2018 - 340€
 
► La prise de risques en protection de l'enfance : enjeux et modalités de
> mise en oeuvre :séminaire les 21 et 22 mars 2018 - 340€
 
► PPE : du projet de l'enfant au projet pour l'enfant : séminaire les 24 et 25 avril 2018 - 340€
 
 
 
Pour tout renseignement  sur l'École de la Protection de l'Enfance
et la prise en charge financière des séminaires contactez Marie-José Lopez Portland
au Journal des Acteurs Sociaux (JAS)
organisateur des Assises Nationales de la Protection de l'Enfance.
 
 
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À l'heure où les nouvelles technologies ne cessent d'évoluer, votre enfant regarde souvent la télévision ou réclame régulièrement la tablette pour visionner ses programmes favoris ? Quelle attitude adopter en tant que parents ? Le Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA) vous répond.

INFOS COLLOQUE

École nationale
 de protection judiciaire de la jeunesse

LETTRE D'INFORMATION N°4
Les 5 et 6 février 2018, le site central (Roubaix - Nord) de l'ENPJJ accueille deux journées d'étude intitulées « Autorité parentale et filiation, à l’épreuve des pratiques judiciaires et sociales ».
 
Les 5 et 6 février 2018, l’École nationale de Protection judiciaire de la jeunesse (ENPJJ), en partenariat avec l’École nationale de la magistrature (ENM), le Centre national de la fonction publique territoriale (CNFPT) et le Groupement d’intérêt public enfance en danger (GIPED), organise deux journées d'étude intitulées « Autorité parentale et filiation, à l’épreuve des pratiques judiciaires et sociales » au site central (Roubaix - Nord) de l'ENPJJ. 

 
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Agenda
Arcades de l'ENPJJ
 
14

NOVEMBRE 2017

5ème soirée de l’enca-drement : Management et humanisme

Le 14 novembre 2017 à l’EHESP de Rennes, mana-gement et humanisme viennent clôturer les soirées de l’encadrement de l’ENPJJ. Des conférences à retrouver en vidéo.


21

NOVEMBRE 2017

Centre-Est : un colloque sur la justice restaurative

Le 21 novembre 2017, l’ENPJJ, en partenariat avec l’ENM, l’UCLY et les DISP de Lyon et Dijon, organisent un colloque sur le thème de la justice restaurative.   

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21 / 22 NOVEMBRE
5 DÉCEMBRE 2017

Ile-de-France : « Enfants de retour de zone de guerre. Quelles prises en charges ? »

Le PTF Ile-de-France Outremer de l'ENPJJ accueille une formation relative aux prises en charge d'enfants de retour de zone de guerre.
En savoir plus →
 
29
 
NOVEMBRE 2017

Toulouse : Journée d’étude « Accompagner les enfants victimes de la guerre »


Le 29 novembre 2017, l’ENPJJ co-organise une journée d’étude consacrée à l’accompagnement des enfants victimes de la guerre à Toulouse.

Lire l'article →

30 NOVEMBRE

1er DÉCEMBRE 2017

18èmes journées de valorisation de la recherche :

Les 18èmes journées de valorisation de la recherche de l’ENPJJ, intitulées « Autour des jeunes. Les réseaux de sociabilité : quelles ressources éducatives ? » se tiendront les 30 novembre et 1er décembre 2017. Le préprogramme est disponible.
DU 5 AU 9
DÉCEMBRE 2017
13ème édition du festival international du film d’éducation

La 13ème édition du festival international du film d’éducation aura lieu du 5 au 9 décembre 2017 au cinéma Pathé Evreux.

En savoir plus→
Lumière sur...

mardi 17 octobre 2017

la confiance dans la relation d aide


Jacques Trémintin


La démarche d’aide et d’accompagnement peut difficilement aboutir si la personne qui en bénéficie ne ressent pas ne serait-ce qu’un début de confiance à l’égard des professionnels. Mais, à l’inverse, l’intervenant peut-il vraiment agir avec pertinence et efficacité s’il ne nourrit pas une certaine confiance à l’égard des usagers ? Il y a là une forme de réciprocité qui se déploie à juste distance entre deux extrêmes : d’un côté une parité s’appuyant sur une pleine relation d’égalité et, de l’autre, une soumission et une dépendance de l’aidé envers l’aidant.
Les psychologues ont pris l’habitude de fonder leur intervention sur une démarche de demande de la part de leur patient. Sans une adhésion minimale, ils affirment ne pas pouvoir intervenir auprès d’eux. Même si l’on peut comprendre qu’il est difficile, voire carrément impossible, d’élaborer un travail psychique avec quiconque si celui-ci est hostile à cette démarche, une telle posture a connu de multiples dérives, réduisant le champ de l’intervention au seul public déjà convaincu de ses difficultés et de la pertinence du soutien qui pourrait lui être apporté. Certains psychologues ont toutefois compris qu’il ne fallait pas se limiter à l’expression formelle de cette sacro-sainte demande et qu’il fallait aussi la travailler, la solliciter et la stimuler.
Renonçant à se réfugier dans leur tour d’ivoire, quelques-uns n’hésitent plus, rompant ainsi avec les arcanes de la profession, à partager des moments du quotidien avec les publics qu’ils côtoient. En participant, par exemple, aux repas dans un foyer éducatif ou en étant présents à des activités informelles, ils rompent avec le dogme de la neutralité bienveillante qui interdit d’avoir à entrer dans un réel partagé. Ils perdent certes en distanciation, mais cette proximité relative favorise d’autant plus l’adhésion et la confiance, dès lors où ils n’apparaissent plus seulement comme ces interlocuteurs énigmatiques, silencieux et un peu inquiétants. Pour autant, c’est bien aux psychologues que l’on doit la prise de conscience de nos professions, de placer l’usager en situation non d’objet mais bien de sujet de l’action qui le concerne. La personne aidée ne doit pas se comporter tel un être passif, mais comme actrice de tout ce qui joue pour elle.

Compétences de l’usager

Les travailleurs sociaux auraient potentiellement plus de facilité à tisser un lien de confiance réciproque avec les usagers. Inscrite dans la dynamique du « vivre avec » et du « faire ensemble », leur action peut plus facilement obtenir des résultats visibles et concrets. Même si elles ne sont pas forcément couronnées de succès, les démarches entreprises, les orientations proposées et les solutions esquissées permettent de faire évoluer peu ou prou la problématique dans l’« ici et le maintenant », au mieux en la dénouant, au pire en provoquant une mobilisation. Pour autant, la professionnalisation de ces intervenants, si elle a permis d’accroître leur qualification et leur compétence, a aussi entraîné un certain nombre d’effets pervers. L’enrichissement que peuvent apporter les sciences humaines peut ainsi induire une forme de mépris à l’égard du savoir profane, celui que peut développer tout individu confronté à des difficultés et placé dans l’obligation d’avoir à tenter de les résoudre.
La posture de technicien de la relation, éprouvé aux méthodes d’aide, peut amener à négliger les compétences dont sont dotés des usagers très souvent aptes à élaborer par eux-mêmes des modalités pour progresser, pour peu qu’on y soit attentif. La conviction et/ou l’envie qui animent l’intervenant dans son désir de vouloir et de savoir ce qui est bien pour l’autre peut parfois se concrétiser par une dérive hégémonique à son égard.

Assumer sa subjectivité

La prétention à l’objectivité est un leurre et une illusion. Chacun d’entre nous, fonctionne avec des a priori et des préjugés. C’est même là notre principale façon d’appréhender la réalité. La psychologie évolutive explique que dans la savane, nos lointains ancêtres de la Préhistoire devaient identifier toute situation nouvelle dans un délai d’autant plus bref que leur survie pouvait être mise en jeu : y avait-il un danger qui allait provoquer une fuite salvatrice ou pouvaient-ils rester sur place, sans risque ? Leur cerveau recherchait rapidement dans leur mémoire des analogies avec ce qu’ils avaient déjà rencontré pour identifier et tenter de catégoriser la nouveauté à laquelle ils avaient à faire. Cinq millions d’années après, nous n’avons guère changé. Confrontés à ce que nous ne connaissons pas, nous établissons des comparaisons avec ce que nous avons déjà vécu.
Spontanément, nous nous attendons à ce qu’un jeune de banlieue soit en difficulté, un parent d’enfant maltraité manque de compétences éducatives et une personne porteuse de handicap peu apte à faire preuve d’autonomie. Faire confiance à l’usager, c’est rompre avec ces représentations automatiques. Être professionnel, ce n’est pas renoncer à ses préjugés ni aux inévitables représentations, mais réussir à les reconnaître pour mieux les dépasser. Aller à la rencontre de l’autre, c’est tenter de mieux le découvrir tant dans son potentiel que dans ses fragilités, non pas tel que nous l’imaginons, mais tel qu’il est.

lundi 16 octobre 2017

protection de l'enfance

 jusqu'où travailler avec les parents ?

De nombreux cadres et gestionnaires des politiques sociales (re)découvrent une réalité qui existe déjà depuis fort longtemps. Il demandent aux travailleurs sociaux d’être dans l’écoute, d’accompagner et «d’aller avec» les personnes qu’ils rencontrent, comme si cette pratique n’existait plus. Les référentiels de compétences rappellent cette nécessité. En protection de l’enfance, jusqu’où aller avec l’adhésion du (des) parent(s) ? C’est une question que l’on peut légitimement se poser. Elle a fait l’objet d’un échange entre des assistants sociaux réunis à Nantes le 15 décembre dernier à l’initiative de l’ANAS. Nous avions centré ce débat en réaction de l’émission polémique intitulée les enfants volés d’Angleterre.

En voici quelques éléments…
Nous avons fréquemment affaire à des parents, qui ne veulent pas « collaborer », qui ne sont pas acteurs. La justice de son côté ne prend pas toujours ses responsabilités. Quand une mesure d’AEMO échoue, ou qu’il est noté que le professionnel ne peut travailler avec la famille, il n’y a pas de mesure de protection systématiquement engagée, même quand il y a de fortes probabilités de maltraitance. Certains parents rejettent même parfois de façon violente toute tentative de travail estimant qu’ils ont à faire avec des mesures de justice arbitraires. Pour eux, la seule volonté du travailleur social serait de leur retirer la chair de leur chair, leurs enfants comme s’il celui-ci avait un intérêt particulier à le faire autre que la protection. 
Il est tout à fait possible de comprendre cette souffrance de parent qui est du même ordre que celle de celui qui, lors d’une séparation, voit son enfant partir avec l’autre conjoint, celui justement que l’on ne supporte plus. Certains parents notamment de nombreux pères ne peuvent plus maintenir des liens affectifs avec leur enfants pour de multiples raisons. (éloignement, méfiance à leur encontre, non prise en compte de leurs capacités etc.). Des parents peuvent aussi être très toxiques et représenter une réelle menace pour leur enfant. Il ne faut pas le nier non plus. Tout cela est délicat. Le travailleur social en charge d’une mesure peut rapidement devenir le bouc émissaire d’une situation qu’il n’a pas choisie. Celle par exemple où deux parents se disputent violemment la garde de leur enfant en s’accusant mutuellement.
Alors travailler avec et pour eux, oui certes mais jusqu’où et comment ? Il n’est pas possible de répondre simplement en quelques lignes à une question aussi complexe mais nous pouvons noter quelques points.
Concernant l’ASE, sur les 280 000 enfants pris en charge en permanence sur le territoire, il y a quelques centaines  et peut être même quelques milliers d’enfants, pour lesquels la prise en charge échoue : c’est en effet inacceptable disent certains. Toutefois, «si on entend un arbre qui tombe, on n’entend pas une forêt qui pousse » Nous ne voyons que les échecs, mais oublions toutes nos réussites, celles qui font qu’un enfant protégé devient un adulte autonome, équilibré et responsable. Nous sommes surtout préoccupés par tous ces jeunes issus des mesures ASE qui tout au contraire ne peuvent se construire et deviennent des adultes qui portent en eux les stigmates d’une vie faite de ruptures et de violences notamment psychologiques. L’un ne doit pas faire oublier l’autre.
Contrairement à ce que certaines associations de défense des familles pensent, les assistants de service social sont soucieux des besoins des enfants et de pouvoir évaluer les possibilités de coopérer avec les parents autant que possible.
Or nous assistons toujours au combat qui oppose les tenants de la théorie de l’attachement qui estiment que les enfants doivent être rapidement séparés de leurs parents lorsqu’il y a un risque pour eux et ceux qui sont nommés les « familialistes », qui estiment que la séparation de l’enfant de ses parents fait trop de dégâts et finalement ne permet pas à l’enfant de se construire harmonieusement.
Ce combat entre familialistes et partisans de l’attachement est finalement assez stérile même s’il est possible d’en comprendre les tenants et les aboutissants.
Chaque situation nécessite une grande attention et une évaluation suffisamment fine permettant de se positionner avec 3 approches très différentes telles que nous l’a proposé Jacques Trémintin invité à débattre à Nantes :
1- « Je travaille toujours avec les parents quand cela est possible » 2- « Je travaille sans les parents quand ils sont abandonniques, lorsqu’il est quasiment impossible de les mobiliser » 3- « Je travaille « contre » les parents quand ils sont « toxiques » et que le danger est avéré et les séquelles réelles » Ce sont les 3 axes de travail qu’il reste nécessaire d’articuler en fonction de chaque situation. C’est bien là aussi toute la difficulté.
Il nous faut en effet reconnaître que, s’il est possible de travailler avec de nombreux parents, on ne le peut pas avec tous. Tout simplement.
Mais n’avons nous pas un déficit dans nos méthodes d’évaluation ? A partir de faits graves, il est demandé aux travailleurs sociaux de suivre des protocoles à la lettre. Or c’est fréquemment en dehors des protocoles que les choses se passent. Des effets pervers existent.
Certains travailleurs sociaux en arrivent à « forcer le trait » pour obtenir une décision de protection du juge. C’est la mise en place des informations préoccupantes, qui a provoqué cette dérive et la volonté permanente de « déjudiciariser ». La multiplication de ces informations préoccupantes invite à travailler vite et à se poser de moins en moins de questions ou des question assez simplistes qui ne tiennent pas suffisamment compte des contextes de vie et des parcours de chacun. Il ne s’agit pas d’excuser mais de comprendre. Or aujourd’hui, il suffirait de suivre des procédures pour bien protéger. Nous savons que ce n’est pas la bonne réponse.

Le travailleur social chargé d’une mesure de protection restera toujours confronté à des dilemnes. Il reste important que cela ne soit pas lui qui prenne les décisions et soit inscrit dans une forme de « toute puissance ». Il doit certes éclairer, informer mais aussi soutenir, aider et protéger. Ce sont là ses principales missions. Ils a besoin d’être respecté dans son travail pour les accomplir, et ce n’est malheureusement pas toujours le cas. Mais n’oublions pas que lorsque quelques arbres tombent dans la forêt, nous en entendons le fracas.  Mais nous n’entendons pas tous ces arbres qui poussent en silence à l’image de ces enfants protégés qui sauront vivre plus tard une vie d’adulte autonome et apaisée

L’omniprésence de la question des places


Une constellation de lieux en accueil familial : 




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Comment se vit le quotidien dans ces familles non ordinaires ? Quelles sont les places physiques et affectives dévolues aux enfants ? L’ordonnancement de places est-il tout simplement systématisé ou au contraire singulier ? Quel rapport peut-on établir entre les lieux de vie des parents et la place accordée à l’enfant ? Par les petits « riens » de la vie, les pratiques de table, la disposition de l’espace, se dessinent les places distinctives des enfants. Force est de constater le peu de travaux en France et à l’étranger portant sur ces questions alors même qu’elles se situent au centre du débat sur le dispositif de parentalité [4][4]  Gérard NEYRAND (sous la Direction de), Préserver le.... Partant de ce constat, une étude nous semble essentielle. L’objectif de cet article est de présenter une partie des résultats d’une recherche doctorale portant sur les relations affectives au sein du placement familial en se focalisant sur deux axes d’analyse : la place de l’enfant en famille d’accueil, puis celle accordée à l’enfant selon les lieux de vie de ses parents.
? Méthodologie de la recherche  [5][5]  Nathalie CHAPON-CROUZET, Relations affectives et parentalité...
Quarante assistantes maternelles de l’Aide sociale à l’enfance ont été rencontrées à leur domicile où un entretien semi-directif d’une durée moyenne d’1 h 30 a été réalisé.
Une analyse des dossiers des enfants placés à leur domicile a été effectuée afin d’obtenir une information sur les trajectoires de vie des parents, le déroulement du placement, les relations familiales...
Pour chaque entretien, des segments de discours ont été repérés indiquant les conceptions explicites ou implicites des liens entre la famille d’accueil, les enfants placés et la famille d’origine. Pour chaque assistante maternelle, les principales ressemblances et différences dans la manière de parler de l’un ou l’autre des enfants placés ou ayant été placés ont été analysées.

 Le placement familial, une question de place

 Une quotidienneté presque ordinaire

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Les notions de lieux et de place sont d’une importance capitale en accueil familial. Nous entendons par lieux, les espaces géographiques dans lesquels les enfants placés évoluent, aussi bien dans leur famille d’accueil que dans les lieux de rencontre avec leurs parents. Le lieu est l’espace où se situe une chose, où se déroule une action. Nous verrons quels sont les lieux de vie de l’enfant et comment il s’y inscrit. Nous utiliserons également la notion de place en distinguant les aspects spatial et affectif, pour en retenir le sens symbolique et la possibilité pour l’enfant de prendre ou non une place affective dans la famille d’accueil.

 Des règles de vie ritualisées

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Le placement d’un enfant dans une famille d’accueil soulève des craintes et la nécessité d’une adaptation de l’enfant aux règles de vie en vue de trouver un juste équilibre. L’enfant apprend à se conformer aux règles de la famille et perd progressivement ses anciennes pratiques et ses repères. L’adaptation, « c’est en effet proposer, voire imposer, à l’enfant le climat familial, sa routine de vie, ses habitudes, ses valeurs, bref un ensemble existentiel qui, aux yeux de la famille d’accueil, est un don généreux proposé de tout cœur, mais qui, pour l’enfant, est nouveau et le plus souvent à l’opposé de ce qu’il vient de vivre et de quitter » [6][6]  Myriam DAVID, Enfant, parents, famille d’accueil ;....
5
L’adaptation de l’enfant passe par le respect des règles de vie et des pratiques éducatives de la famille d’accueil. Ces règles se manifestent par une organisation précise des activités dans le temps et un respect de ce rythme familial. La vie est organisée du lever au coucher et rythmée par les repas, l’école et les devoirs. Son acceptation par l’enfant préjuge pour la famille d’accueil de la réussite du placement.
6
L’analyse du fonctionnement de la famille d’accueil montre une organisation ritualisée de l’accueil et une certaine rigidité à l’agencement des séquences de la vie courante [7][7]  Maria MAÏLAT, « Les rites dans les foyers de l’aide.... Vivre ensemble, c’est ici établir des limites, déterminer un espace pour chacun, afin de tenir compte de tous.

 Des pratiques de table...

7
Le repas est un moment important, un lieu d’échange et de communication entre les membres de la famille d’accueil. Il ne se résume pas à l’acte de manger, il s’enrichit de pratiques spécifiques. L’alimentation, la disposition spatiale des enfants et des parents d’accueil, les manières de table s’acquièrent par un apprentissage journalier et deviennent des pratiques ritualisées. Pour Claude Levi-Strauss, « la cuisine d’une société est un langage dans lequel elle traduit inconsciemment sa structure, à moins que, sans le savoir davantage, elle ne se résigne à y dévoiler ses contradictions » [8][8]  Claude LEVI-STRAUSS, L’origine des manières de table,....
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Quelles sont les places des enfants et des parents d’accueil à table ? Les places de chacun sont attribuées en fonction de l’âge des enfants, de l’aspect pratique pour la préparation et le service du repas et des affinités de chacun. Proche de la mère d’accueil ou du père d’accueil, entre les enfants placés ou non, la place de l’enfant est à la fois une question de pratique et de lien affectif. Dans certaines familles, la serviette de table est l’objet qui fonctionne comme repère et qui donne le sens de la place. La serviette de table est un objet ordinaire, mais saturé « de significations implicites » [9][9]  Jean-Claude KAUFMANN, Le cœur à l’ouvrage, Théorie.... « Chaque matin, en mettant son bol sale dans l’évier (...), en essuyant le dessus de la table pour enlever les miettes du petit-déjeuner, en poussant les miettes dans une pelle, en vidant la pelle dans une poubelle (...), chaque matin, par ces gestes et par mille autres, l’homme ordinaire reconstitue les bases d’un système d’une complexité inouïe. Un système d’ordre et de classement, définissant la place de chaque chose dans un ensemble d’agencements, qui, malgré sa modestie apparente, crée les fondements de toute civilisation [10][10]  Jean-Claude KAUFMANN, 1997, op. cit., p. 11.. »

Un moment privilégié 

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Le repas, pratique ritualisée est-il considéré comme un moment particulier ? Les manières de table diffèrent selon les familles d’accueil ; le repas peut être un moment privilégié de recomposition familiale après une journée associant l’ensemble des membres du foyer ; il peut également être un moment de restauration dissocié. Si la plupart des enfants prennent leur repas avec la famille d’accueil et rentrent le midi déjeuner à la maison, une faible minorité mange régulièrement à la cantine et d’autres dînent séparément du couple d’accueil.
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Les pratiques culinaires dissociantes sont incomprises par les assistantes maternelles associant l’ensemble des enfants au repas. Elles l’expliquent par un exercice du métier orienté uniquement vers l’aspect financier et estiment qu’une telle pratique fait l’impasse sur la notion de place symbolique de l’enfant dans la famille.
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« Manger ensemble, dormir, aimer : pratiques et imaginaires quasi atemporels. Pratiques et imaginaires chargés de sens également, au plus près de l’individu [11][11]  Jean-Claude KAUFMANN, La chaleur du foyer, Analyse... ». Manger ensemble ou séparément, au-delà de l’acte de nourrir, est révélateur de la construction de relations particulières avec l’enfant. On retrouve dans certaines ethnies la pratique de la circulation des enfants associée à une conception nutritionnelle de la parenté. La théorie nourricière reconnaît la construction d’une nouvelle parenté par la nourriture créatrice de lien [12][12]  Suzanne LALLEMAND, La circulation des enfants en société....
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Dans le cadre du placement familial, les aspects nourriciers induisent certaines pratiques de la parentalité et construisent un type de lien affectif, lien différencié selon les enfants et les familles d’accueil.

 Des places distinctives

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Avec le temps, l’enfant placé prend ses repères et ses marques et s’installe au sein de la famille d’accueil, en prenant sa place. Double place de l’enfant, l’une spatiale, l’autre affective, l’une visible et exposée, par les lieux qui lui sont attribués dans la maison (place à table, chambre...), l’autre imperceptible et discrète, par la place dans le cœur.
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La première place de l’enfant dans la famille d’accueil est tout d’abord spatiale, les assistantes maternelles disent d’ailleurs de ces enfants « qu’ils prennent de la place ». Par le placement, une nouvelle école attend les enfants, avec de nouveaux compagnons de jeu et une nouvelle maison leur est offerte. Cette inscription spatiale de l’enfant s’accompagne d’une délimitation de l’espace, d’un lieu intime et particulier pour ses affaires personnelles, ses jouets, ses habits, ses photos..., une chambre personnelle ou partagée.
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Quand l’enfant arrive dans la famille d’accueil, un espace composé d’un lit et d’un bureau lui est donc accordé [13][13]  Il s’agit d’une obligation contractuelle, d’un critère.... La chambre est une véritable unité de vie où l’enfant dort, étudie et joue, trois fonctions majeures [14][14]  F. NIETZERT, « Une chambre d’enfant, pour quoi faire ? »,.... L’enfant prend possession des lieux, de sa chambre et aura progressivement la possibilité d’investir ou non la famille d’accueil, en s’octroyant une place affective, si elle-même le souhaite.
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L’espace réservé à l’enfant peut évoluer vers plus d’intimité en modifiant la disposition spatiale des membres de la famille d’accueil, certaines d’entre elles prévoyant même d’agrandir la maison. D’autres peuvent au contraire refuser de laisser une place plus importante à l’enfant, lui montrant ainsi son désengagement, son refus de poursuivre son placement et son accueil. Le logement est un espace intime, individuel et familial, « il s’agit d’abord de le faire sien, de se l’approprier » [15][15]  Martine SEGALEN, Sociologie de la famille, Paris,....
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Fatima, assistante maternelle vit dans un appartement à loyer modéré, en banlieue parisienne avec son mari et ses enfants. Elle reçoit à son domicile deux enfants placés par l’Aide sociale à l’enfance : Sophia, une petite fille de 3 ans, pour un placement apparemment à long terme, et Hamid, 15 ans, adolescent en difficulté, pour un placement temporaire de 4 mois. Ces deux enfants partagent les chambres de ses propres enfants adolescents, regroupés par sexe : Hamid dort sur un lit de camp, glissé sous un lit durant la journée, dans la chambre des garçons, et Sophia dans un lit superposé dans la chambre des filles. Sophia est accueillie à ce domicile depuis l’âge de 6 mois et elle y restera vraisemblablement jusqu’à sa majorité, selon l’assistante maternelle. Pour l’instant, l’espace qui lui est réservé est très réduit, se résumant à un lit, mais l’assistante maternelle, très attachée à l’enfant, envisage dès sa scolarisation en primaire de lui attribuer un espace plus important composé d’un bureau et d’une moitié de chambre. Elle ne souhaite pas, en revanche s’investir dans une relation avec Hamid, adolescent trop difficile qu’elle a du mal à gérer. Elle n’envisage pas de le garder chez elle, ni de lui attribuer un espace plus personnel.
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Derrière les arguments « d’un manque d’espace », « pas de chambre seule », « pas de bureau ni de bibliothèque », c’est aussi la question de la place de l’enfant dans la famille qui est posée et du lien affectif. On retrouve dans cette situation l’importance accordée au respect des règles de vie établies dans la famille d’accueil. La comparaison avec la petite Sophia, éduquée dans le sens choisi par l’assistante maternelle, les liens qui l’attachent à l’enfant induit une différence considérable avec Hamid, adolescent de « passage ».
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Certaines places spatiales sont refusées, d’autres sont en revanche associées. C’est le cas pour cette famille d’accueil, où Nagim, le benjamin de la famille, partage sa chambre avec Nicolas, un garçon placé de son âge, à la place de son frère aîné. Les enfants s’entendent bien et apprécient ce partage, ils ont des liens affectifs très étroits. La place de Nicolas dans la famille est particulière, si particulière que... « Nicolas, lui..., je vais dire un truc idiot, mais il fait partie de la famille ».
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Ces premiers résultats de la recherche soulèvent un certain nombre de questions. Est-ce que l’ordonnancement de la place des enfants est systématisé ou tout simplement à chaque fois original ? Est-ce que la place dévolue à l’enfant connote une relation particulière avec l’assistante maternelle et la famille d’accueil ?
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Nous avons vu que le partage de l’espace de vie peut susciter une modification des places symboliques de chacun selon les caractéristiques du dernier arrivant et bouleverser la structure de certaines familles d’accueil. Malgré le souhait de respecter l’entité familiale existante avant le placement, notamment la structure par âge des enfants de la famille d’accueil (les places d’aîné et de benjamin), on constate qu’avec les extensions d’agrément et les besoins du service, les enfants placés ont le plus souvent la position de benjamin. Cette position associée à un ensemble de facteurs (l’âge de l’enfant au moment du placement, son comportement, son sexe, son histoire familiale, la présence ou l’absence des parents, l’histoire de la famille d’accueil, ses attentes implicites par rapport au placement de l’enfant, son expérience dans la profession) influencent inévitablement la construction de la relation entre l’enfant placé et la famille d’accueil [16][16]  Nathalie CHAPON-CROUZET, 2003, op. cit.. Il s’agit d’une construction affective originale et non systématisée pour chaque enfant.
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Ces préférences affectives, bien qu’imperceptibles, se dissimulent dans les choix et les distinctions spatiaux. Les places spatiales et affectives sont très intimement liées. Elles sont attachées aux notions de parcours de vie, de durée de placement, de l’âge de l’enfant au moment du placement et, plus généralement, du temps passé ensemble durant la période de l’enfance. Qu’en est-il des relations entre l’enfant placé et sa famille d’origine ? Après avoir examiné la notion de place dans le lieu d’accueil, nous proposons une analyse des relations familiales d’origine et des lieux de rencontre.

 Relations familiales et lieux de rencontre

 Des relations familiales variables

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Afin d’avoir une vue complète des lieux de vie de l’enfant placé, nous nous intéressons aux relations familiales d’origine à partir des lieux de rencontre. Quelles relations l’enfant placé et ses parents d’origine entretiennent-ils ?
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La majorité des enfants touchés par notre enquête ont des relations parentales régulières pendant leur placement, bien qu’essentiellement avec la mère. Le père, lui, a tendance à s’installer dans un retrait progressif dès le placement des enfants. Du coup, les relations avec lui sont extrêmement faibles, voire inexistantes. Cela semble indiquer, ici encore plus que dans d’autres contextes sociaux, que les mères sont généralement le référent de l’enfant développant avec lui des relations régulières. La prise en compte de l’histoire de l’enfant, de ses parents et plus généralement de la famille d’origine sont des éléments importants pour comprendre l’évolution des relations familiales.
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Les résultats montrent que le nombre d’enfants concernés par l’absence de relations parentales augmente avec l’âge et que les placements longs correspondent à des enfants qui ont été placés très jeunes dans les familles d’accueil, chez lesquelles ils ont passé toute leur enfance. Au-delà de 13 ans de placement, ce sont souvent des adolescents ou de très jeunes adultes qui font le choix de ne plus voir leurs parents ou qui n’ont plus de nouvelles de leurs parents depuis plusieurs années.
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L’analyse des écrits des travailleurs sociaux révèle que les différentes phases de vie matrimoniale des mères peuvent fragiliser les relations développées avec leur enfant placé [17][17]  Marthe COPPEL, Yannick DUMARET, Que sont-ils devenus ?.... La reprise des rencontres maternelles est très souvent associée à une phase de stabilité conjugale et personnelle. Cette stabilité affective est aussi spatiale, donc déterminante pour les intervenants du rétablissement de visites à domicile. Dans ce contexte de prise en charge, on constate tout le poids de la conjugalité sur d’autres dimensions de la vie privée, notamment celle de la pratique de la parentalité [18][18]  Didier Houzel, 1999, op. cit.. La stabilité conjugale maternelle s’accompagne le plus souvent d’une stabilité spatiale qui permettra à la mère d’exercer son droit de visite et ses fonctions de mère en développant certaines pratiques éducatives non exercées jusqu’alors. On mesure ici toute l’incidence de la conjugalité sur la parentalité. Où les enfants placés rencontrent-ils leurs parents ?

 Des lieux de rencontre en mouvement

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Les lieux de vie structurent et font sens pour chacun d’entre nous. Même si les souvenirs diluent les traits de « nos maisons » d’enfance, nous restons toujours marqués par ces lieux où nous avons vécu. Nous nous inscrivons quotidiennement dans les maisons que nous habitons. « Elles sont vraiment « notre coin du monde » [19][19]  Jean-Claude KAUFMANN, 1988, op. cit., p. 79., le cosmos le plus concret, le plus tangible et le plus proche. Elles contiennent une multitude d’objets et d’images mêlés avec lesquels nous entrons en interaction et nous nous identifions. Ils forment nos micro-références de chaque instant. Sans eux, nous ne parviendrions plus à être nous-mêmes [20][20]  Ibid.. »
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Les enfants placés ont aussi leur coin du monde, leurs maisons d’enfance à la fois d’origine et d’accueil. Or, force est de constater que les parents d’origine étant caractérisés par une instabilité socio-économique et spatiale, il est difficile pour les enfants et leurs parents d’avoir une référence spatiale commune, un univers familial, alors même que la maison (au sens de logement) est une unité symbolique, un espace primaire sécurisé, « un refuge clos » [21][21]  André LEROI-GOURHAN, Le geste et la parole. La mémoire....
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La maman de Ted vit à l’hôtel depuis plus de quinze ans, celle de Steven a déménagé quatre fois en deux ans, celle du petit Amine vit actuellement chez sa sœur, mais elle ne pourra y rester trop longtemps et devra trouver une autre solution... Nombre de pères sont sans domicile fixe. On pourrait ainsi multiplier les exemples tant cette population de parents est concernée par une instabilité spatiale.
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Or, on constate que l’instabilité des lieux de vie parentaux engendre une instabilité des lieux de rencontre avec l’enfant. Il est difficile pour les parents de se retrouver dans un lieu intime quand ils ne possèdent plus de logement. Où rencontrer son enfant quand on vit à l’hôtel ou chez un ami ? Sans cet espace de sécurité familiale, les relations avec l’enfant sont perturbées, en recherche de sens. Une chambre d’hôtel ne renferme pas la signification matérielle et symbolique d’un logement.

 Des lieux de rencontre multiples

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Malgré l’importance reconnue des rencontres à domicile, les lieux de rencontre sont multiples, dépendant des situations familiales, de l’histoire et du contexte du placement et du souhait des protagonistes. Les rencontres peuvent tout aussi bien se dérouler dans un lieu privé, « la maison », que dans un espace public comme un jardin.
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Différents lieux de rencontre existent selon la situation familiale d’origine ; allant de l’espace public, restructurateur de lien, à l’espace privé, celui de l’intime, en passant par des espaces intermédiaires où se jouent d’autres modes d’interaction :
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  • un lieu accompagné pour des rencontres au service de l’Aide sociale à l’enfance dans une salle réservée à cet effet sous la surveillance d’un tiers,
  • un lieu public pour des rencontres à l’extérieur accompagnées ou non ; l’espace public étant vu ici comme un support au maintien de relations parentales,
  • un lieu réservé pour des rencontres autonomes à l’extérieur du service dans un logement à disposition des parents,
  • un lieu privé pour des rencontres au domicile parental. Le lieu réservé est plus un lieu de passage et de retrouvailles familiales qu’une réelle place du privé et de l’intime. Cependant, il forme à l’évidence un espace privilégié pour les familles dans le « vivre ensemble », malgré l’absence de logement.
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Nombre de parents et d’enfants placés connaissent l’ensemble de ces lieux de rencontre qui correspondent aux différentes phases de leur histoire relationnelle. L’évolution spatiale des rencontres est associée à l’investissement des parents pendant le placement de leur enfant, à la manifestation de leur intérêt, par leur présence aux visites, à une série d’indicateurs permettant d’identifier une évolution favorable des relations.
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Le cheminement se fait progressivement par la confirmation de chaque étape. Le respect du calendrier de visite, l’identification d’une sensibilité parentale exprimée au sujet de l’enfant, l’autonomie parentale, une stabilité spatiale permettent l’accès à la dernière phase, la consolidation des liens par des visites en lieu privé.
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Ces résultats soulèvent la question des lieux de vie des parents d’origine et leur rapport à la place accordée à l’enfant. Même si la mobilisation des souvenirs et des sentiments refoulés chez l’enfant sont souvent plus importants, selon certains auteurs, que la rencontre elle-même [22][22]  P. D. STEINHAUER, Le moindre mal, la question du placement..., le lieu où parents et enfants se retrouvent est aussi significatif du lien. Les relations familiales établies sont de nature différente selon les lieux de rencontre. Dans l’espace privé, l’enfant peut de nouveau délimiter sa place et se positionner dans son intimité, dans l’espace public, la rencontre à l’extérieur a un tout autre objectif, celui d’un maintien des liens. L’espace public est ici un lieu de rencontre et de relations pour des parents et des enfants qui n’ont d’autre possibilité, « c’est aussi un symbole où est relégué tout ce qui ne peut prendre place au sein de la sphère privée » [23][23]  Stéphane TESSIER (Dir.), L’enfant et son intégration.... Une récente recherche confirme notre analyse en constatant qu’en fonction de la relation d’attachement entre parents et enfant placé, le lieu de visite varie [24][24]  Ercilia PALACIO-QUINTIN, Jacques MOORE, « La relation.... Les enfants ayant une relation d’attachement sécurisante rencontrent leurs parents à leur domicile, alors que les enfants ayant un attachement insécurisant les rencontrent à l’extérieur du domicile parental. Les auteurs constatent aussi que les enfants qui rencontrent leurs parents à leur domicile ont plus de contacts que ceux qui les rencontrent à l’extérieur.

 Conclusion

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Ainsi, nous constatons qu’au-delà d’une constellation de lieux en accueil familial, c’est un ordonnancement de place dont il est à chaque fois question, pour chaque enfant. Place spatiale et place symbolique en famille d’accueil, places originales et non systématisées, explicitées par un ensemble de facteurs. Ces places dans la famille d’accueil sont marquées par l’histoire du placement, des enfants et de la famille d’accueil, elles sont donc spécifiques d’une situation et d’un contexte. Les dons ou les refus d’une certaine occupation de l’espace domestique (pas de chambre, pas de bureau...) connotent la relation entre la famille d’accueil et l’enfant. Certains enfants sont considérés comme étant de passage, cohabitant à un moment d’une période de vie, d’autres en revanche sont installés depuis longtemps et resteront vraisemblablement jusqu’à leur majorité. Leurs places spatiales et affectives dans la famille d’accueil ne peuvent donc être que différentes. Nous considérons que ces situations présentent des formes distinctes d’accueil et de construction de relations affectives, tout en se situant dans un dispositif de suppléance [25][25]  Nathalie CHAPON-CROUZET, 2003, op. cit., c’est-à-dire qui souligne l’altérité et le complément avec la famille d’accueil. Il ne s’agit pas là d’une substitution, qui désigne le remplacement total et définitif [26][26]  Paul DURNING, Education et suppléance familiale en.... La famille d’accueil ne remplace pas les parents, elle les supplée, et c’est sans doute pour cela que la question des places et des lieux qui y sont afférents est si complexe. Si bien que les situations variées de placement en arrivent à un ordonnancement selon quatre catégories de suppléance [27][27]  Nathalie CHAPON-CROUZET, 2005, « Un nouveau regard... :
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  • la première catégorie, la suppléance substitutive est paradoxale puisqu’elle associe deux logiques antinomiques. Elle se caractérise par une situation de substitution de la famille d’accueil à la famille d’origine lors de placement de longue durée et s’accompagne d’une déperdition des liens d’origine ;
  • plus conforme à l’idéal du placement, la deuxième catégorie, la suppléance partagée se caractérise par un double lien d’affiliation tout en réaffirmant les places de chaque famille auprès de l’enfant. La filiation de l’enfant est reconnue. Elle s’accompagne d’un élargissement de la parentalité ;
  • la troisième catégorie, la suppléance investie, se caractérise par une prédominance des parents soutenue par la famille d’accueil dans son accès et son maintien à la parentalité. Il s’agit d’un réel soutien à la parentalité d’origine. Cette catégorie correspond à l’objectif principal de l’Aide sociale à l’enfance, c’est-à-dire un placement temporaire et un retour rapide de l’enfant dans sa famille d’origine ;
  • la dernière catégorie, la suppléance incertaine, dévoile une situation de placement tardif, provisoire, en attente d’évolution et qui n’ose de ce fait affirmer sa position. Les familles sont faiblement impliquées dans le placement de l’enfant qui se trouve sans réel appui affectif.
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Cette analyse pose un regard nuancé sur les différentes places accordées à l’enfant. L’exercice de fonctions éducatives parentales, dans un dispositif de suppléance, place les assistantes maternelles dans une position de partage des composantes de la parentalité avec les parents. Ainsi, les axes de la pratique et de l’expérience (définis par Houzel) peuvent être investis différemment par les familles d’accueil et les parents. La coexistence des lieux de vie d’accueil et d’origine induit inévitablement ce partage, une parentalité partielle pour les parents et une parentalité singulière pour les familles d’accueil. Comme P.D. Steinhauer, nous envisageons le placement de l’enfant sous l’angle du partage et de son épanouissement dans la structure d’accueil, tout en conservant des liens d’attachement avec ses parents. Une reconnaissance mutuelle des familles est alors nécessaire à la réalisation de cette alchimie, pour que cette parentalité partagée soit une mesure bénéfique pour l’enfant.