vendredi 24 mars 2017

émission





     allez voir sur   you tube       l emission    


       "le monde en face "ma mere ce poison"                       

soirée débat du 1er juin 2017

L'association Ass Fam 17, ensemble !

vous convie

le jeudi 1er juin 2017 à 19h30
au Palais des Congrés de Rochefort ( salle Pierre Loti)



à une soirée débat en présence d'Adrien Durousset .





A partir de la loi du 05/03/07 , qui met l'enfant au coeur du dispositif de protection de l'enfance, nous aborderons les questions suivantes :

"Comment les places respectives de l'enfant, des parents se construisent elle? "

"Comment s'articule leur prise en compte dans le cadre d'un placement?"

"Quelles sont les priorités des Educateurs, des Familles d'Accueil ?"


et, nous aborderons un sujet d'actualité qui nous arrive dans le champ de la Protection de l'Enfance:

"Comment appréhender la radicalisation en Famille d'Accueil?"


assfam17ensemble.blogspot.com

lundi 20 mars 2017

article du 20/03/17 dans la Gazette , enfants du djihad

Aide sociale à l’enfance

Enfants du djihad : les départements en première ligne


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© Oleg_Zabielin - Fotolia.com
Plus de 400 mineurs devraient rentrer d’Irak et de Syrie au cours des prochains mois. Ces enfants, qui ont connu la guerre et l’embrigadement, seront majoritairement pris en charge par les services de l’aide sociale à l’enfance. Un plan gouvernemental devrait être annoncé dans les prochains jours.

vendredi 17 mars 2017

autisme

  INVITATION
                      AUTISME

Tout savoir sur l’autisme avec la présence
de l’association NOHA
      Ce thème  sera débattu
Le Samedi 1ER Avril 2017 à
15 H
au foyer rural d’ASNIERES-LA-GIRAUD

Informations /questions
  sur un sujet important
Le verre de l’amitié clôturera la séance 

interview de Laurence Rossignol , le 13/03/17

Protection de l'enfance

« Les enfants revenant de Syrie doivent faire l’objet d’une prise en charge »

Publié le • Mis à jour le • Par • dans : A la une, Actu prévention sécurité, France • Club : Club Prévention-Sécurité

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© Ministère de la Santé
Un an après la loi relative à la protection de l'enfant, la ministre des Familles, de l'enfance et des droits des femmes, Laurence Rossignol, tire un premier bilan. Dans un entretien à la Gazette, elle évoque également le plan gouvernemental de prise en charge des "enfants du Djihad". La ministre promet une meilleure prise en charge par l'ASE et un volet formation des travailleurs sociaux dédié à la déradicalisation.

 

Quel bilan tirez-vous de la loi relative à la protection de l’enfant du 14 mars 2016 ?

L’objectif de cette loi était de sortir la protection de l’enfance de l’angle mort des politiques publiques. Bien que mobilisant des financements importants – environ 7 milliards d’euros par an sur le budget des départements – c’est une politique rarement mise au débat. De ce point de vue, je crois qu’on a réussi à faire parler de la protection de l’enfance. Le bilan que je tire est aussi un bilan de méthode.
Pendant un an, nous avons mené un long travail de concertation avec l’ensemble des professionnels mais aussi des usagers, que ce soit les jeunes adultes passés par la protection de l’enfance ou les parents d’enfants placés. Notre objectif était de décloisonner les actions autour de l’enfant en danger. Je pense que nous y sommes parvenus, et le Conseil national de la protection de l’enfance (CNPE) que j’ai installé au mois de décembre vient concrétiser cette volonté de pluridisciplinarités et pluri-institutionnalités. Il regroupe toutes les institutions et les organismes qui sont intéressés par la protection de l’enfance avec, en particulier, la fonction de définir des orientations et des formations pluridisciplinaires et pluri-institutionnelles autour de ce sujet.

Lors des débats parlementaires, le CNPE avait fait craindre aux départements une certaine recentralisation de la compétence. Qu’en est-il ?

Pour préparer la loi, nous avions mis en place un groupe de travail avec les départements, qui rassemblait le plus souvent les vice-présidents chargés de la protection de l’enfance. Ce groupe n’a pas cessé de se réunir. Il rassemble les territoires qui, hors de tout clivage politique, s’intéressent à leurs politiques en matière de protection de l’enfance. Pour ceux-là, la démarche de la loi et la création du CNPE sont considérées comme une étape positive.
Je suis d’ailleurs souvent allée dans des territoires qui ont organisé, au niveau départemental, le même type de réunions qu’au niveau national et mis autour de la table les juges pour enfants, l’Education nationale, les services du département, les médecins… Bref, toutes celles et ceux qui sont des acteurs de la protection de l’enfance.
Les départements qui ont voulu s’inscrire dans l’esprit de la loi ont mis en place des cadres de concertation et d’élaboration qui leur sont propres pour faire avancer la pluridisciplinarité. Je n’ai pas les moyens d’obliger ceux qui ne veulent pas le faire, mais je note que beaucoup prennent à cœur cette politique. Une chose est claire : il y avait un besoin de retour du régalien dans la protection de l’enfance. Et nous sommes arrivés, à mon sens, à redonner à la fois des orientations et une philosophie communes à la protection de l’enfance, tout en respectant la compétence des départements.
Nous sommes arrivés, à mon sens, à redonner à la fois des orientations et une philosophie communes à la protection de l’enfance, tout en respectant la compétence des départements.

Un rapport de l’Observatoire national de la protection de l’enfance a souligné que de nombreux départements n’ont pas mis en place le projet pour l’enfant (PPE) après la loi de 2007. Quelle est la situation aujourd’hui ?

D’abord, nous nous sommes interrogés sur les raisons pour lesquelles les départements n’utilisaient pas davantage cet outil. Probablement parce que c’est un exercice supplémentaire pour les travailleurs sociaux. Nous avons instauré par décret, en septembre dernier, un référentiel commun qui ne s’impose pas mais qui est un guide, une grille, pour aider à la rédaction du PPE et à la méthode de ce projet. Cet outil doit faciliter le travail des éducateurs. Nous n’avons pas suffisamment de recul pour faire une évaluation chiffrée. Mais, ce qu’on a intuitivement senti, c’est une montée sur les PPE.

Vous avez présenté, le 1 er mars, le premier plan interministériel de lutte contre les violences faites aux enfants. Dans quel but ?

Inspiré des plans de lutte contre les violences faites aux femmes, c’est une mobilisation interministérielle qui couvre plusieurs champs. Le premier est de sensibiliser et d’alerter l’opinion sur l’ampleur des violences faites aux enfants, qu’elles soient physiques, psychologiques ou sexuelles. On a eu plusieurs cas dramatiques récemment. J’observe que ces familles dans lesquelles des enfants sont morts avaient toutes des voisins, qui organisent ensuite des marches blanches. C’est très bien, mais ce qui est mieux encore c’est de signaler avant le drame.
Il y a une culture à changer. A commencer par cette idée que non, la liberté éducative ne va pas jusqu’à la maltraitance. Quand un enfant est victime, nous sommes tous concernés. Signaler, c’est sauver. Nous sommes bien plus avancés dans la dénonciation sociale des violences faites aux femmes, qu’on ne l’est aujourd’hui dans celles faites aux enfants.
Il y a vingt-cinq ans, quand une femme était frappée, on disait que cela ne regardait pas l’extérieur, que c’était une affaire familiale. Ce n’est plus le cas aujourd’hui. Alors que pour les enfants, on le dit toujours, jusqu’à ce que le drame survienne. Le but n’est pas simplement d’empêcher les meurtres, le but est qu’il n’y ait pas d’enfants qui soient élevés dans la terreur des coups et des violences psychologiques. Il faut renoncer à frapper pour élever les enfants. Cela nous concerne tous.

De nombreux département ont coupé dans leurs budgets de prévention spécialisée en 2016. Des annonces avaient été faites. Où en est-on ?

Sur la prévention spécialisée, nous avons signé avec Patrick Kanner une convention nationale sur la prévention spécialisée avec des têtes de réseaux et l’ADF en septembre 2016, qui renforce la collaboration entre l’Etat et les départements. Les instructions financières données par le gouvernement, en particulier grâce au fonds de prévention de la radicalisation, favorise le financement de la prévention spécialisée.
En particulier, des expérimentations renforcent la présence d’adultes en soirée et les week-ends dans les quartiers politique de la ville.
Nous avons confié au CNLAPS [Comité national de liaison des acteurs de la prévention spécialisée] une étude cartographique de la prévention spécialisée avec des recommandations qui viendront alimenter les discussions du groupe de travail interministériel mais je pense qu’il y a un débat politique à avoir autour de la prévention spécialisée.
Nous avons aujourd’hui, dans certains quartiers, des situations difficiles avec des mouvements, voire des manifestations : je crois que les réponses ne sont pas uniquement dans les rapports police-citoyens – les rapports police-jeunes en particulier. Une des réponses, c’est la place du travail social et de la prévention spécialisée dans ces quartiers. Cette question devrait être à mon sens plus présente qu’elle ne l’est dans le débat aujourd’hui.

Toujours dans le contexte de la lutte contre la radicalisation, va progressivement se poser la question des retours d’enfants de Syrie ou d’Irak qui devront être pris en charge par l’ASE…

Un groupe de travail est copiloté par mon ministère et le ministère de la justice. Nous avons mis en place une procédure d’accueil des enfants au moment du retour qui prévoit entre autres que tous les enfants revenant de Syrie doivent faire l’objet d’une prise en charge par l’ASE, soit d’une AEMO, soit d’un placement.
Il est en effet nécessaire de fournir un accompagnement psychologique adapté à la situation de ces enfants. Une instruction interministérielle sera prochainement publiée.

Y aura-t-il des formations particulières pour les travailleurs sociaux pour encadrer ces enfants ?

C’est le travail du comité interministériel de prévention de la délinquance et de la radicalisation et le travail est déjà engagé : la formation spécifique des travailleurs sociaux sur la radicalisation est déjà en cours depuis deux ans. Ce sont des milliers de personnes qui ont été formées.

Donc suffisamment pour encadrer les 400 enfants de retour ?

On estime que ce sont 200 femmes et 400 mineurs qui pourraient revenir. Mais pour le moment, seuls 24 sont rentrés. Les prises en charge dépendent de l’âge des enfants, de la situation de la famille et de l’environnement en France. Dans certains cas, les ressources familiales sont utiles et dans d’autres, elles sont toxiques. C’est le travail du juge pour enfants de le déterminer et, après, de mettre en place, avec l’ASE, l’accompagnement de l’enfant.
Mais il faut aider les départements, en particulier les départements du Val-de-Marne et de la Seine-Saint-Denis – qui sont les départements où arrivent les enfants – dans cette nouvelle responsabilité, presque une nouvelle tâche. C’est ce que nous faisons.


mardi 14 mars 2017

assises de la protection de l ' enfance

lundi 3 juillet   et   mardi 4 juillet 2017  .... à Paris

    10 emes assises nationales de la Protection de l'Enfance.


  Avons nous progressé?
  Est ce mieux ailleurs ?
  Comment relever de nouveaux défis ?



PROGRAMME

depuis la réforme du 5 mars 2007, alors plébiscitée, et dont le projet avait été débattu lors des 1èresAssises nationales de la protection de l’enfance, dix ans ont passé.
dix ans de progrès accomplis mais aussi d’insuffisances récurrentes qui ont nécessité le vote d’une nouvelle loi (14 mars 2016) centrée sur l’intérêt de l’enfant et le pilotage de la politique de protection de l’enfance.
Or, malgré ces adaptations réglementaires et les efforts constants des professionnels et des institutions, les doutes subsistent sur la capacité de notre modèle à assurer in fine l’efficience des réponses apportées. et les tensions sur le terrain semblent s’amplifier dans un contexte, de surcroît, de plus en plus complexe et imprévisible.
Quel véritable bilan peut-on tirer de ces dix dernières années?
Sur quoi avons-nous progressé, sur quoi avons-nous régressé?
Fait-on mieux ailleurs?
Pourra-t-on s’adapter à la vulnérabilité exponentielle de notre société et à la déliquescence de la plupart des repères éducatifs?
Quelles perspectives pour notre système et nos pratiques?
telles sont les questions sur lesquelles nous vous proposerons de débattre lors de cette édition anniversaire des Assises qui sera précédée d’un sondage auprès de l’ensemble des acteurs de la protection de l’enfance pour recueillir leur position.

vendredi 10 mars 2017

Rapport d'étude de l'ONED



Rapport d’étude :
« L’accueil familial : quel travail d’équipe ? »
Eléments de synthèse

En juillet 2015, l’ONED publie un rapport sur l’accueil familial géré directement par les services départementaux. L’accueil familial - et les conditions dans lesquelles il s’organise constitue un enjeu absolument majeur pour la protection de l’enfance. Au 31 décembre 2012, 69 000 enfants étaient pris en charge par un peu moins de 40 000 assistants familiaux, ce qui représente plus de la moitié des enfants confiés aux services de l’ASE. Au vu des histoires de vie de ces enfants et de leurs effets sur leur santé physique, psychique et sur leur développement, il est indispensable de réfléchir à un type d’accueil et d’accompagnement pertinent. 
Cette forme de suppléance peut répondre à ces besoins et offrir une sécurité d’attachement à un enfant confié à l’ASE. Mais, pour cela, l’accueil familial doit reposer sur un cadre institutionnel qui soutienne non seulement l’assistant familial mais également une équipe pluridisciplinaire. L’ensemble des professionnels de cette équipe doit développer de nouvelles compétences et un même souci de l’accueil familial, afin de l’adapter à la situation de chaque enfant et de ses parents. 
Dix ans après l’entrée en vigueur de la loi du 27 juin 2005,  l’étude vise à établir un état des lieux de l’organisation et du fonctionnement de l’accueil familial dépendant directement des départements, afin d’éclairer l’influence de l’organisation et des pratiques institutionnelles sur le positionnement des assistants familiaux dans leur mission d’accueil. L’hypothèse centrale de cette étude est que les choix organisationnels ont un impact sur l’exercice quotidien des missions de l’ensemble des professionnels et partant, sur la possibilité que ces activités
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professionnelles produisent une clinique orientée vers l’intérêt de l’enfant et son bon développement. 
Pour conduire cette étude, l’ONED s’est appuyé sur plusieurs supports : une enquête par questionnaires auprès des conseils départementaux, des visites sur site ayant permis la passation d’entretiens avec les acteurs locaux dans 9 départements, une analyse de la littérature scientifique sur l’accueil familial et des documents collectés auprès des départements (35 fiches de poste/procédures-questionnaires - critères de recrutement, 12 projets de service, 24 référentiels et/ou guide de l’accueil familial, etc.), une étude de contenu de propos tenus dans le cadre d’une communauté en ligne d’assistants familiaux.
Partie 1. L’accueil familial dans les départements : une pratique en mouvement
L’accueil familial représente depuis longtemps le premier mode d’accueil de la protection de l’enfance, en moyenne sur l’ensemble de la France et de façon singulière dans près des deux tiers des départements. Les données de l’enquête ONED concluent à une part de placement familial de 58 %, avec des taux allant de 20,8 % à 90,7 % selon les départements. Le nombre moyen d’enfants confiés à des assistants familiaux est de 1,8 avec des valeurs variant de 1,1 à 2,4 selon les départements. 
Deux grandes problématiques ressortent de l’état des lieux effectué dans le cadre de l’étude. Ce mode d’accueil est aujourd’hui confronté à une tension sur le renouvellement et l’extension des places disponibles. Comme le montre l’analyse des schémas départementaux, cela conduit les services à développer des actions pour améliorer le recrutement d’assistants familiaux, et à réorganiser, souvent de façon centralisée dans le territoire, un dispositif de gestion des places disponibles. 
Par ailleurs, on observe une diversification des formes de mise en œuvre de l’accueil familial : 58 des départements répondants (81) pratiquent l’accueil familial pour l’accueil d’urgence, 56 pour les bébés nés sous le secret et 52 pour l’accueil séquentiel ; 42 départements utilisent l’accueil familial pour les enfants de moins de trois ans, 36 pour des mères mineures avec leur enfant, et 11 selon des modalités de placement sans déplacement ; 18 disposent de services d’accueil familial pour adolescents. Cette diversification est confirmée par l’étude des schémas départementaux, où figurent également des projets de placements familiaux spécialisés en réponse aux besoins de certains publics, notamment celui de jeunes présentant différents types de troubles.
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Partie 2. Un environnement institutionnel encore à structurer 
Si peu de références juridiques éclairent le contenu éducatif de la prise en charge en accueil familial, les apports des sciences de l’éducation, avec la notion de suppléance, ont permis de dégager la pratique de l’accueil familial d’une position de substitution aux parents. Les apports de la clinique pédopsychiatrique et de la psychanalyse de l'enfance soulignent la complexité des problématiques qui conduisent à la prise en charge d'un enfant en placement familial, les effets qui en découlent sur la situation d'accueil et les conditions d’un accompagnement favorisant le développement et le bien-être de l'enfant.
Sur ce dernier point, les structurations de l'accueil familial dans les départements ont été interrogées. Constatant une grande disparité de modèles organisationnels, l’étude propose une typologie combinant trois grands domaines d'actions : la gestion des carrières et des conditions contractuelles, l'accompagnement et le soutien des pratiques professionnelles, le suivi socio-éducatif du public. Pour structurer les dispositifs d’accueil familial et caractériser les équipes et leurs missions, les départements ont très majoritairement développé des documents de type administratif ou de gestion. Les documents plus dédiés au déroulement de la prise en charge socio-éducative sont mis en place de façon minoritaire : 24 départements sur les 81 répondants, soit moins de 30 %, disposent d’un projet de service, neuf ans après son obligation par la loi du 27 juin 2005. Au regard du corpus de connaissances disponibles, les documents analysés sont très faiblement référencés aux notions et concepts théoriques développés autour du placement familial. Néanmoins, le thème de la continuité de vie de l’enfant est la notion la plus présente.  
Partie 3. Le travail d’équipe en accueil familial
La notion d’« équipe » revêt une importance fondamentale dans la mise en œuvre et le déroulement d’un accueil. Les difficultés évoquées par les acteurs pour se constituer en équipe et, surtout, pour enclencher une véritable dynamique d’équipe, se déclinent en plusieurs aspects. Tout d’abord, l’acceptation et l’intégration des assistants familiaux aux espaces communs de travail est un point problématique. Il existe encore de très fortes disparités entre les départements et entre les territoires d’un même département, sur l’implication des assistants familiaux aux réunions diverses, sur la prise en compte de leur parole et de leur ressenti et dans certains cas sur leur accueil dans les locaux de l’ASE.  
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Ensuite, la relation assistant familial-référent reste ambivalente au regard des besoins de l’enfant. Alors que cette relation est le moteur de la prise en charge et de l’accueil de l’enfant, elle peut être traversée de tensions et ne pas offrir, dans certaines situations, un cadre sécurisant à l’enfant. Plusieurs éléments (répartition imprécise des tâches notamment sur les actes ususels, faible disponibilité des référents submergés par les tâches de travail administratives et le nombre de suivi qui leur sont attribués, volonté des assistants familiaux de prouver par eux-mêmes leur professionnaliseme et de « protéger » leur lieu de vie et leur vie familiale du regard des référents, etc.) concourrent à créer une distance et de possibles malentendus entre référents ASE et assistants familiaux. 
Tout cela peut fragiliser la position commune que doivent adopter les assistants familiaux et les référents ASE face à la famille de l’enfant, et in fine, produire des effets contre-intuitifs sur l’enfant lui-même. Pour remédier à cet écueil, de nombreux conseils départementaux ont entamé une réflexion sur la notion de « référence » et sur l’intérêt de distinguer les processus d’accompagnement des enfants, des parents et des assistants familiaux. 
Partie 4. L’accueil familial en actes : des outils pour soutenir la pratique
De nombreux outils sont issus de ce travail engagé par les services des départements. Nous pouvons les rassembler en quatre groupes, chacun possédant un objectif spécifique et orienté vers un aspect particulier du travail des assistants familiaux. 
Le premier ensemble d’outils regroupe les dispositifs de soutien à la professionnalisation. Ces outils ont pour vocation d’offrir un appui et une écoute aux assistants familiaux, de les accompagner et de les aiguiller lorsqu’ils font face à des situations complexes, imprévues ou inquiétantes. 
Le deuxième groupe renvoie à des outils de développement de la réflexivité des assistants familiaux. Ces outils de pratiques réflexives permettent aux assistants familiaux, dans un premier temps, de les aider à consigner leurs observations et leurs réflexions sur le déroulement de l’accueil et, dans un deuxième temps, de prendre du recul face aux événements du quotidien, de donner du sens, dans une posture distanciée, à leurs observations afin de pouvoir alimenter la réflexion de l’équipe sur le déroulement de l’accueil et le devenir du suivi et de la situation du jeune. 
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Le troisième groupe est composé des outils pour la pratique quotidienne des assistants familiaux. Ces outils sont des indications de réponses soit à des situations concrètes de la vie quotidienne, soit à des événements qui se manifestent dans l’urgence. Ces outils peuvent servir de « bonnes pratiques de la vie quotidienne » permettant aux assistants familiaux d’orienter leurs comportements, leurs choix et leurs décisions face à des situations courantes ou exceptionnelles.  
Enfin, un dernier ensemble regroupe les outils destinés aux conjoints des assistants familiaux, ouvrant la dimension de l’accueil à la cellule familiale.
Cette étude soulève l’importance de mettre en place une organisation adaptée aux enjeux collectifs de l’accueil familial, fournissant aux assistants familiaux et à leurs plus proches partenaires un cadre de travail et des outils leur permettant de continuellement se situer, pour devenir « sujet[s] de [leur] pratique professionnelle »1, dans une démarche réflexive qui les protège en tant qu’individu tout en servant les enfants qui leur sont confiés. 

Préconisations
À l’issue de cette étude, l’ONED émet différentes préconisations :
I - Sur le plan des connaissances, il conviendrait : 
Préconisation 1 : De développer des recherches sur les assistants familiaux et notamment sur leurs caractéristiques sociodémographiques.
Préconisation 2 : D’améliorer et de développer des outils (nationaux et départementaux) permettant de visualiser les flux d’entrée et de sortie des assistants familiaux dans les services ASE des départements, voire dans les services du secteur habilité. L’ONED doit y apporter sa contribution.
Préconisation 3 : De soutenir le développement du dispositif de remontée des données codifié à l’article L. 226-3 du CASF et réglementé par le décret du 27 février 2011, en vue d’en extraire des données relatives aux parcours des enfants et des jeunes en accueil familial.
                                                           1 Ravon B. L'extension de l'analyse de la pratique au risque de la professionnalité. Empan, 3/2009, n° 75, p. 116-121.
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Préconisation 4 : De conduire une étude de cohorte d’enfants confiés aux assistants familiaux à partir d’indicateurs de besoins, de bien-être et de développement.
Préconisation 5 : De favoriser la production de recherches scientifiques sur certaines formes diversifiées d’accueil familial pour lesquelles la littérature est actuellement insuffisante (accueil mère-enfant, services d’accueil familial pour adolescents...), afin d’améliorer les orientations au regard des besoins des enfants.
II – Sur le plan de l’organisation des services d’accueil familial, il est nécessaire : 
Préconisation 6 : De mettre en place, pour les départements n’ayant pas encore répondu à cette obligation légale, un projet de service ASE dans lequel figurera l’organisation de l’accueil familial.
En outre, il conviendrait également : 
Préconisation 7 : De mener des travaux complémentaires, prenant mieux en compte la complexité des situations, sur la notion de « référence » (type de mission et d’accompagnement, charge de travail, etc.).
Préconisation 8 : De garantir un minimum d’encadrement et d’accompagnement par et pour les référents ASE. En effet, il paraîtrait pertinent de poser des normes nationales sur le nombre de rencontres annuelles entre les assistants familiaux et les référents ainsi que sur le nombre d’enfants suivis par référents. De plus, les référents ASE doivent pouvoir bénéficier également d’un encadrement soutenant et en adéquation avec les objectifs qui leur sont attribués.
Préconisation 9 : De clarifier les missions relatives au cadre d’emploi et les missions d’accompagnement auprès des assistants familiaux.
Préconisation 10 : De mieux identifier, repérer et baliser les temps d’échange et de synthèse entre assistants familiaux et référents au vu de l’évaluation de l’accueil et de l’évolution du jeune.
Préconisation 11 : De développer des outils de communication ciblés auprès des réseaux proches des assistants familiaux et sur les territoires les plus en déficit afin de favoriser le recrutement et le renouvellement des effectifs d’assistants familiaux.
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Préconisation 12 : D’organiser de façon centralisée la rencontre entre l’offre et la demande de places en accueil familial pour les enfants relevant de l’ASE.
III – Sur le plan des outils pour la pratique, il conviendrait :
Préconisation 13 : De renforcer la formation des professionnels de l’ASE participant à l’orientation et au suivi des enfants confiés aux assistants familiaux sur la prise en compte de l’intérêt supérieur de chaque enfant et de ses besoins spécifiques.
Préconisation 14 : De développer des offres de formations communes qui réunissent l’ensemble des acteurs de l’accueil familial (assistants familiaux, référents ASE, psychologues, cadres) et qui intègrent dans leur contenu la dimension clinique.
Préconisation 15 : De veiller à proposer ou développer des espaces d’aide à la réflexivité (analyse des pratiques, supervision par exemple) pour les assistants familiaux ainsi qu’aux autres professionnels à tous les niveaux d’implication (référents ASE, cadres des services d’accueil familial).
Préconisation 16 : De développer une offre de groupes de paroles et d’expression pour les proches des assistants familiaux (conjoint voire enfant(s) des assistants familiaux).

ANALYSE DE LA PRATIQUE EN PLACEMENT FAMILIAL

            Oxymoron

Oxymoron | 2 Contrôle Supervision 

Xavier Gassmann  : 
Analyse des pratiques en placement familial

Résumé

L’analyse de la pratique à destination des assistantes familiales ouvre un lieu frontière entre différents registres qui touchent tout autant aux enjeux actuels mobilisés par l’enfant accueilli que ceux qui croisent la place qu’il vient occupé dans le complexe familial de l’assistante familiale. Lieu frontière qui ouvre aussi un écart avec un discours objectivant et qui invite les assistantes familiales à entrer de fait dans une expérience autre de la parole.

Index

Mots-clés : dépendance , parole, séparation, violence

Plan

Texte intégral

1Nous aborderons ici le dispositif du placement familial à partir d’interventions d’analyse de la pratique menées dans des institutions inscrites dans le secteur de la protection de l’enfance, c’est-à-dire auprès d’enfants ou d’adolescents qui ont fait l’objet d’une mesure de placement sur décision judiciaire. Ce dispositif, s’il n’est pas nouveau en soi, a fait l’objet de profondes modifications. Il fut un temps où l’enfant était placé dans une famille, ou plus précisément auprès d’une « nounou » quasiment jusqu’à sa majorité et sans véritable reconsidération de la mesure. Aujourd’hui, ces pratiques se sont modifiées mais il reste que ce type de placement possède des spécificités qui lui sont propres. Le placement d’un enfant dans une famille d’accueil suscite des effets variables tant chez l’enfant que pour chacun des membres de la famille d’accueil.  Les familles d’accueil et l’assistante familiale en particulier travaillent en articulation avec une équipe éducative mais ces différents acteurs qui interviennent dans la prise en charge de l’enfant n’opèrent pas dans le même lieu.
2Chacun de ces intervenants est aux prises avec les représentations et les discours qui traversent le secteur de la protection de l’enfance mais quels en sont les effets dans la pratique complexe du placement familial ?
3Discours et représentations mettent sur le devant de la scène l’intrication singulière de chacun avec ce qui émerge du côté de la maltraitance, tant entre les professionnels eux-mêmes que vis-à-vis des enfants accueillis et leurs parents. Cela trouve de plus aujourd’hui une étroite résonance avec ce qui est véhiculé dans le discours social ambiant.
4Si la fenêtre de la maltraitance est prédominante dans ce secteur, chacun se voit convoqué dans sa pratique dans des positions qui mobilisent dans certains cas des mouvements contradictoires, voire projectifs et qui ne sont pas sans laisser sourdre des rigidifications qui peuvent aller jusqu’au clivage. L’un se veut toujours plus protecteur que l’autre, au prétexte que l’un voit et l’autre pas, l’un prend des mesures et l’autre laisse faire, au point d’actualiser dans des scenarii une partition qui distingue les bons des mauvais, comme s’il s’agissait de séparer le bon grain de l’ivraie.
5Dans ce mécanisme, dès que surgit du mauvais qui n’est pas sans rappeler la maltraitance subie par l’enfant dans son milieu familial, la tentation est grande de l’écarter, de la repousser, de la rejeter et si possible de trouver un autre en mesure de l’incarner, et ce d’autant plus lorsque les parents de l’enfant se sont d’eux-mêmes ou par consentement mutuel écartés d’une présence régulière.
6Cet enfant à protéger est source d’investissements multiples, croisés et il mobilise autour de lui un nombre variable d’intervenants. Du juge qui prononce la mesure de placement, en passant par l’aide-sociale à l’enfance qui assure la fonction gardienne, jusqu’au service de placement composé des différents professionnels qui organisent l’accueil de l’enfant dans une famille, voilà déjà une chaîne décisionnaire d’intervenants multiples où ne vont pas manquer de se croiser malentendus et controverses, quant aux décisions à prendre qui ponctuent le quotidien de cet enfant une fois dans sa famille d’accueil.
7L’ensemble de ces acteurs va avoir, à divers titres et divers moments, une incidence plus ou moins directe dans l’évolution de l’accueil de l’enfant et de son placement. Toutefois, ces mouvements ont déjà cours entre les différents intervenants qui officient à l’intérieur de l’institution placement familial.
8Effectivement l’équipe d’un placement familial est multiple et diverse mais avec ceci de particulier qu’elle n’opère pas dans une unité de lieu et de temps mais sur des scènes différenciées et diverses, nous essayerons dans un premier temps d’en appréhender les effets quant à la notion même d’équipe.
9A partir de ce contexte, nous interrogerons les spécificités de l’analyse des pratiques auprès des professionnelles que sont les assistantes familiales en nous appuyant sur différents contextes d’intervention.
10En placement familial, la notion même d’équipe est souvent revendiquée sous la forme d’un leitmotiv ou d’une incantation, comme pour conjurer la menace d’un déséquilibre ou d’un éclatement entre d’un côté ceux qui travaillent dans les locaux du service et appelés dans certains lieux « équipe technique », et de l’autre côté l’ensemble des assistantes familiales dont il est dit qu’elles font partie de l’équipe même si au quotidien, elles ne sont pas présentes à l’endroit où se réunit l’équipe.
11L’équipe technique est le plus souvent composée d’éducateurs, d’un chef de service et dans certains cas de psychologues. Les assistantes familiales sont des professionnelles dont le statut1 a été depuis peu modifié. Depuis lors, elles sont différenciées des assistantes maternelles qui accueillent les enfants à la journée, là où les assistantes familiales les accueillent à temps complet et en étroite association avec une institution de placement familial. C’est depuis cette loi qu’elles sont ainsi nommées, avant l’intitulé de leur profession était aussi « assistante maternelle ».

Complexe familial et famille d’accueil

12Ce découpage formel entre assistantes familiales et les autres professionnels n’est pas sans effet dans les représentations et les pratiques à l’œuvre. Si les assistantes familiales travaillent à leur domicile et quand bien même sont-elles toujours plus amenées à participer à diverses réunions de travail, elles ne sont pas au quotidien dans le lieu de référence de l’institution.
13Bien au contraire, l’exercice de leur activité professionnelle à leur domicile les conduit à opérer au milieu de leur famille. Famille qui est au demeurant mise à contribution comme cela se dit dans ce secteur d’activité. Si l’assistante familiale est celle qui est salariée, elle est recrutée avant tout en tant que famille d’accueil et par son choix, c’est l’ensemble de sa famille qui entre dans ce projet de travail.
14De fait, l’assistante familiale met sa famille au travail avec l’accueil d’un enfant. Différence notable qu’elles ne manquent pas de relever comparativement aux autres professionnels qui ne mettent pas en direct leur famille à contribution.
15Ils ont de leur côté cette possibilité de différencier vie professionnelle et vie personnelle ; pour elles, bien au contraire, cela est totalement intriqué. Qu’un événement survienne dans leur vie personnelle, cela entre aussitôt dans l’espace de leur activité professionnelle.
16Cette frontière poreuse entre ces deux lieux donne de fait au cadre de l’activité du placement familial une coloration particulière.
17Effectivement, dans ce secteur d’activité, les professionnels entrent dans le territoire singulier de la vie familiale. Que ce soit celui de la famille de l’enfant, cela fait partie de la pratique usuelle des équipes éducatives, mais intervenir sur le territoire de celles qui sont considérées comme leurs collègues, cela est beaucoup moins habituel.
18Comme elles le disent : « on ouvre nos familles ». En premier lieu par l’agrément qu’elles doivent obtenir de l’aide sociale à l’enfance pour pouvoir exercer et qui fait l’objet régulièrement d’un renouvellement. Ensuite, auprès de chacun des services de placement qui prend le temps de savoir avec quelle famille ils vont travailler, ce qui les amènent à rencontrer celle2 qui sera la future salariée mais aussi son conjoint et ses enfants.  
19Lors d’un groupe d’analyse de la pratique, une assistante familiale rapportait la scène suivante : alors qu’elle accueillait un enfant du même âge que l’un des siens, l’éducatrice qui se rendait régulièrement à son domicile saluait l’enfant dont elle avait la référence, mais elle a le souvenir qu’elle ne saluait pas sa fille alors en bas âge.
20Au-delà de la dimension anecdotique et parcellaire de cet événement, ce que vient dire cette assistante familiale, c’est l’attention toute particulière qu’elle attend de ceux à qui elle ouvre la porte de sa famille. Attention qui doit être portée à la famille d’accueil et dont chacun des membres est un des agents particuliers dans le travail exercé auprès de l’enfant accueilli. L’intervention de l’éducateur peut s’apparenter à un travail d’équilibriste dont l’attention doit se montrer bienveillante, délicate mais aussi rigoureuse et précise avec à l’horizon toujours le risque d’apparaître intrusive.
21Effectivement, de multiples enjeux sont à l’œuvre lorsqu’un sujet décide de s’engager dans cette profession et d’engager simultanément sa famille. Que ce soient les composantes actuelles liées à la structuration de la famille, à la place occupée par chacun en terme de différenciation générationnelle et de fonction symbolique entre père et mère mais aussi à l’intérieur du couple et à la manière dont opère la différence sexuée homme/femme ou bien les composantes liées à l’intrication de ce sujet au prise avec son histoire familiale et la manière dont il peut à travers l’accueil d’un enfant tenter d’en mettre à jour ou de réparer quelque chose. Dans tous les cas, l’ensemble de ces mouvements sera à l’œuvre dans l’accueil de l’enfant et participera aux enjeux transférentiels dans lesquels va se nouer la place que cet enfant occupera dans la famille qui se propose de l’accueillir. Lacan n’écrivait-il pas dans « Les complexes familiaux » : « Tels les sentiments où il faut voir des complexes émotionnels conscients, les sentiments familiaux spécialement étant souvent l’image inversée de complexes inconscients. »3
22Dans ce contexte, le travail d’équipe en placement familial peut relever d’une gageure. Il s’agit d’assurer le suivi de l’évolution de l’enfant dans la famille où il est accueilli en s’appuyant sur le travail engagé par l’assistante familiale et sa famille qui intervient comme partenaire. Toutefois, il s’agit aussi de prendre en compte les mouvements inhérents à la famille d’accueil et tels qu’ils se croisent ou non avec la problématique de l’enfant. Dans ce cas, c’est le complexe familial tel que la famille d’accueil le porte qui devient aussi l’objet de l’intervention psycho-éducative.
23Comment s’inscrivent ces particularités dans la structuration du travail de l’équipe ?
24Effectivement, le « faire équipe » croise directement les spécificités du complexe familial de chacun et la scène de la famille d’accueil s’apparente à un lieu où s’entremêlent idéalisations et projections, comme cela peut s’entendre dans la formulation de Lacan.
25Si certains mouvements peuvent être appréhendés dans le cadre du travail de l’équipe psycho-éducative, d’autres relèvent de ce qui se trouve à la frontière entre pratique professionnelle et résonance intime. L’assistante familiale se sent souvent en danger pour les aborder directement avec ceux qui sont à la fois référent de l’enfant mais qui agissent aussi en qualité d’employeur.

La parole au fait du quotidien des assistantes familiales

26De fait, l’introduction de l’analyse de la pratique à destination des assistantes familiales vise à ouvrir un espace dans l’institution où va pouvoir se parler ce qui agit sur cette frontière. Généralement, les assistantes familiales sont réunies entre elles mais il est souvent nécessaire de constituer plusieurs groupes au regard de leur nombre. La constitution de ces groupes peut relever de diverses contingences mais il arrive aussi que la création d’un groupe soit conditionnée par un choix institutionnel explicite ou non.
27Cette précision interroge de nouveau la structuration du travail d’équipe. Si l’analyse des pratiques s’adresse généralement à l’ensemble des intervenants d’un service, dans le cas présent cette réunion de la totalité des acteurs éducatifs du service dont les assistantes familiales font partie n’est pas envisageable : le nombre des intervenants étant bien trop important.
28De fait dans le contexte pris en compte ici, l’analyse des pratiques s’adresse à une catégorie professionnelle qui réunit des spécificités propres à sa pratique.
29Cette forme d'organisation ne permet pas de fait d’engager un travail sur les alliances et mésalliances à l’œuvre entre l’ensemble des assistantes familiales, mais  oeuvre néanmoins dans le groupe constitué.
30En fonction des institutions, l’inscription dans ces groupes ne relève pas nécessairement de la libre adhésion, les assistantes familiales étant généralement soumises à une obligation de participation sous le motif que cela fait partie du contrat de travail.
31La mise au travail dans ces groupes requiert du temps, que ce soit dans la création d’un sentiment groupal de sécurité interne, ou pour dépasser le discours simplement revendicatif à l’égard de l’institution. Toutefois, peut surgir de ce discours une interpellation de l’institution par les assistantes familiales et qui nous invite à interroger quelle peut être la fonction de ces groupes pour et dans l’institution.
32Ces groupes d’analyse de la pratique pour les assistantes familiales équivalent, selon nous, à l’autorisation d’une expérience de la parole.
33Dans un premier temps, ces groupes peuvent fonctionner sous la forme d’une attente d’un savoir objectivé permettant d’apporter une explication et une solution aux difficultés rencontrées par l’assistante familiale dans l’accueil de l’enfant.
34Lacan écrit à ce propos :
« Le troisième paradoxe de la relation du langage à la parole est celui du sujet qui perd son sens dans les objectivations du discours. Si métaphysique qu’en paraisse la définition, nous n’en pouvons méconnaître la présence au premier plan de notre expérience. Car c’est là l’aliénation la plus profonde du sujet de la civilisation scientifique et c’est elle que nous rencontrons d’abord quand le sujet commence à nous parler de lui : aussi bien, pour la résoudre entièrement, l’analyse devrait-elle être menée jusqu’au terme de sa sagesse »4.
35Quand bien même, le groupe d’analyse de la pratique ne peut se confondre avec ce qui relève d’une analyse, il s’agit bien d’ouvrir un espace au sujet où il puisse entendre quelque chose de sa parole. Ouvrir un écart d’avec un discours censé expliquer au point d’enclore la parole, c’est amener les assistantes familiales à un usage de la parole où vient se croiser un savoir autre.
36Comment peut alors se croiser dans ces groupes le rapport au savoir ?
37Lors d’une séance avec un groupe d’assistantes familiales, une d’entre elles qui devait être présente ce jour là, apparaît soudainement de l’autre côté de la vitre. Le groupe est alors occupé par ce qui est en train de se passer pour cette collègue. Si elles n’en parlent pas, leur regard se porte sur ce qui se joue à l’extérieur du groupe. Ce qu’elles voient, c’est cette assistante familiale aux prises avec la séparation et le départ d’un des enfants qu’elle accueille. Dans cette scène apparaissent des mouvements extrêmement vifs où se mêlent éclats émotionnels et tensions mais tout cela reste sur le moment sans parole. Occupées comme elles le sont par ce qui se passe, je leur propose d’en parler, de ramener ce qu’elles voient chacune de leur place dans le groupe et de fait de le faire entrer dans la parole.
38Leur premier mouvement est de s’excuser comme si elles se sentaient en faute. Cela va les amener à parler de la séparation et du départ d’un enfant lorsqu’elles sont dépassées par l’enfant qu’elles accueillent au point de ne plus pouvoir maintenir sa place dans la famille.
39Lors de la séance suivante, l’assistante familiale qui était restée de l’autre côté de la vitre la fois précédente est cette fois présente dans le groupe. Elle commence par critiquer la manière dont les autres professionnels étaient présents auprès d’elle à cette occasion avec cette impression d’être seule. Ses collègues lui rapportent alors ce qui s’est passé lors de la séance précédente et la manière dont elles ont reçu ce qui s’est passé.L’assistante familiale reprend alors ce qui se passait avec cet enfant et notamment la violence qui était la sienne une fois qu’il était en dehors de la maison. « Chez moi tout se passait bien », dit-elle. Je lui propose de reprendre ce « chez moi », comment s’explique-t-elle que ce qui se passe pour cet enfant à l’extérieur ne concerne pas son « chez moi » ?
40Elle laisse entendre que quelque chose devait être maintenu délié, ce qui ne l’empêchait pas d’accourir au plus vite dans tous les lieux où cet enfant éclatait dans sa crise. « Il n’y a que moi qui pouvait l’apaiser », dit-elle. Elle en fait tout à la fois un point d’honneur mais elle dénonce aussi l’incapacité des autres. Elle se pose comme la seule capable, et par extension elle s’accorde par ce privilège une position d’omnipotence.
41Bien difficile de tenter d’appréhender ce clivage, quand bien même le groupe tente de lui faire entendre aussi sa présence au moment où elles la voient en grande difficulté la fois précédente.
42Pour faire surgir ce savoir autre et sortir de cette position réactionnelle et clivée, il faudra en passer cette fois là par un schéma qui puisse figurer ce qui pour ce moi n’est pas admissible. La construction graphique utilisée à cette occasion ressort d’un savoir où vient se figurer comment l’enfant s’inscrit dans une relation à l’Autre maternel, comment se noue un travail de séparation qui permet de se dégager d’une dépendance absolue. Inversement qu'en est-il pour l’enfant lorsqu’il sort démuni de ces traits identificatoires sans avoir pu les intégrer dans un moi différencié ?
43Le passage par cette construction aura pour effet de s’écarter des discours dominants qui visent à expliquer le comportement d’un enfant ou d’un jeune adolescent uniquement sous l’angle de l’hyperactivité ou d’un enfermement pathologisant qui a pour fonction de destituer chacun de sa position de sujet. Il s’agissait au contraire dans le cas présent d’interroger la place occupée par cet enfant dans l’économie familiale mais aussi auprès de cette assistante familiale en particulier.
44Aborder la famille comme première scène de socialisation ainsi que le formulait Lacan nous ramène à un des points de butée fréquemment rencontré dans le cadre des analyses de la pratique auprès des assistantes familiales.
45Effectivement, l’enfant accueilli occupe dans certains cas une place déterminante auprès de l’assistante familiale et dont il ne peut se déprendre sans susciter des remous. La rançon du don illimité dans lequel la relation s’est nouée maintient l’enfant et l’assistante familiale dans un rapport duel où toute intervention tierce est extrêmement périlleuse. Pris dans un rapport de loyauté à l’égard de celle qui se donne ainsi sans limite, l’enfant ne trouve souvent pas d’autre possibilité que d’agir violemment toute tentative pour s’écarter de cet enfermement.
46La loi dominante est alors celle de l’amour de l’Un, comme pour éradiquer tout ce qui a fait violence dans l’histoire de l’enfant, et qui suscite dès que l’enfant s’en écarte une reviviscence des mouvements de haine.
47L’enfant passe alors d’une position d’idéalisation à une position de rebut de la jouissance de l’Autre et finit par être éjecté de la famille d’accueil qui assiste avec  impuissance à la faillite de la parole de l’Autre barré.
48Une assistante familiale amène ainsi une situation critique qu’elle dit vivre avec un petit garçon de 5/6 ans. Elle accueille cet enfant maintenant depuis quelques années. Depuis peu, il ne cesse de se présenter ostensiblement à elle dans des manipulations de son pénis. Il accompagne quelque fois cette manipulation de questions mais dit-elle, elle ne se sent pas à l’aise avec cela et de plus l’enfant insiste ouvertement et seulement lorsqu’il est seul avec elle.
49Elle se sent démunie et ne trouve pas d’appui pour se sortir de ce dans quoi elle se sent prise avec cet enfant.
50Démunie, elle se dit aussi seule face à l’enfant. Repris dans le groupe, ce qui se passe avec l’enfant est interrogé sous l’angle familial et en particulier du côté de la présence du père d’accueil.
51L’assistante familiale dit alors qu’elle ne veut pas déranger son conjoint avec cela, que c’est son travail, qu’elle doit en faire son affaire sans gêner le cours de la vie familiale. Autour de ces échanges, cela amène le groupe à aborder aussi comment elles se sont débrouillées de ces questions avec leurs enfants. Cette assistante familiale dit ne pas avoir souvenir que cela se soit passé ainsi pour elle avec ses enfants et si elle avait dû faire appel à son mari, il n'aurait pas laissé cela perdurer. A la fin de cette séance, elle envisage de lui en parler.
52Plus tard, elle décrit les effets de l’intervention de son mari et la réaction de l’enfant. Si le premier accepte dans un premier temps de prendre position en indiquant à l’enfant qu’il n’a pas à effectuer ces gestes avec sa femme, ce dernier lui rétorque aussi vite que seule son assistante familiale est en droit d’intervenir auprès de lui.
53A la suite de cette scène, le père d’accueil dit à sa femme de se débrouiller seule avec cela et que ce n’est pas son affaire.
54L’assistante familiale avait certainement vue juste mais n’interroge-t-elle pas à travers l’ensemble de ces réactions, les conditions de la structuration d’une intervention tierce où la parole ne peut être conçue dans l’attente d’un effet magique.
55Effectivement, l’enjeu ici n’est pas tant que l’analyse des pratiques apparaisse comme le lieu de trouvaille de solutions magiques, mais bien comme le lieu où une parole puisse advenir sur ce qui est dans l’impasse, une parole qui puisse ouvrir à une interpellation de l’autre à travers les constructions signifiantes que chaque sujet met en œuvre depuis la participation qui est la sienne dans le groupe.
56Cheminement qui passe par le groupe d’analyse de la pratique où, dans le cas spécifique des assistantes familiales, ce lieu frontière permet que des tâtonnements signifiants puissent se formuler jusqu’à esquisser une parole qui puisse s’énoncer dans d’autres espaces.
57Envisager l’analyse de la pratique comme un lieu frontière, c’est tout autant prendre en compte la fonction de l’articulation signifiante que la spécificité du cadre institutionnel dans lequel ces groupes sont inscrits.
58Ces groupes sont nécessairement marqués d’un écart avec l’institution, qui dans le même temps les promeut. Ecart indispensable pour rendre possible le travail singulier de cette mise en parole si délicate en tant qu’elle vient toucher au plus près l’assistante familiale dans l’espace intime de sa vie familiale. Si par cette parole le sujet se dévoile, elle lui sert aussi d’enveloppe, tant pour penser les manifestations de l’enfant qui entre à vif dans son espace familial, que pour la construction d’un discours pour réaménager la position occupée avec l’enfant ; mais cette parole lui sert aussi dans les relations avec les diverses professionnels qui sont engagés dans l’accompagnement de ce même enfant

LA PROFESSIONALISATION DE L'ASSISTANT FAMILIAL





Articles :

ALLIERES Gilles. Le conjoint de l'assistante familiale : Entre quête de reconnaissance et professionnalisation. Arc, n°126, Octobre 2008-Novembre 2008. pp.22-23
 Contrairement aux apparences, le conjoint est un maillon essentiel dans cette entreprise conjugale et familiale qu'est l'accueil familial. L'auteur montre ici que la famille d'accueil est une mission partagée et souligne par ailleurs que le vocable "famille d'accueil", globalisant cette réalité, n'est cependant pas satisfaisant parce qu'il ne rend pas identifiable les personnes qui la composent, non plus que leur rôle respectif à l'intérieur de cette réalité et souligne ainsi toute la problématique de la reconnaissance professionnelle des assistantes familiales.

GOURAUD Solange. Assistant familial : une profession à choyer. Le journal de l'action sociale, n°134, février 2009. 2009. pp.25-29
 Le dossier présente la profession d'assistant familial, mode d'accueil mal connu mais dont les transformations sont importantes autant du point de vue de la professionnalisation que du mode d'organisation.

JUNG Céline. “Dans la famille Placement, je voudrais... l’assistante familiale”. Le Journal de l'action sociale, n°166, avril 2012. pp.31-35
 Avec 70% de l’accueil assuré par des assistants familiaux, et un objectif de 10%supplémentaires, le Pas-deCalais affiche haut et fort sa conviction que le placement familial est la formule la plus adaptée à l’intérêt de l’enfant placé. Une préférence aujourd’hui largement partagée dans le secteur, mais dont la mise en œuvre opérationnelle ne va pas toujours de soi, du fait notamment des difficultés de recrutement inhérentes à ce métier qui implique plus que tout autre de l’engagement. C’est pourquoi, si la professionnalisation des Assfam peut sans nul doute contribuer à susciter mais aussi à pérenniser les vocations, il ne faut pas que la professionnalité altère la relation avec l’enfant. Comment parvenir à ce subtil équilibre pour faire de l’accueil familial la carte maîtresse du placement ? [Extr.intro.] 


SUNE Jean-Pierre, PUYUELO Rémy (coord). Accueil familial et enfance. Empan, n°80, Décembre 2010. pp.10142
 Dans le contexte actuel du travail social, l'espace familial comme lieu d'accueil, de réparation, de répit - potentiellement moins coûteux - se structure vers une professionnalisation reconnue. Famille d'accueil ? Accueillant familial ? Assistant familial ? Assistant de la famille ? Accueil familial thérapeutique ? Toutes ces variations concernent la protection de l'enfance, des personnes handicapées, des personnes âgées plus ou moins dépendantes. Le diplôme d'État créé en 2006, reconnaît officiellement l'assistant familial comme un «travailleur social» à part entière exerçant au sein d'une équipe, même si cette réalité est vécue de façon diverse selon les institutions et les lieux d'exercice... Dans tous les cas cette nouvelle formation devrait structurer l'identité professionnelle des assistants familiaux par des apports historiques et théoriques mais aussi par la valorisation des expériences des personnes déjà impliquées dans ces fonctions. [Extr. site] 


Ouvrages :

Association nationale des placements familiaux. Regards européens sur l'accueil familial : affaire de famille(s) ? Enjeux institutionnels ? : Actes des 19èmes journées d'étude. Paris : L'Harmattan, 2011. 285p.
 Les journées d'études de l'ANPF ont interrogé la professionnalisation, son intérêt, mais aussi les écueils à éviter, afin de préserver la richesse de l'accueil familial, quand il est intégré dans un dispositif structuré en
La professionnalisation des assistants familiaux
Centre de ressources documentaires – Institut pour le Travail Educatif et Social 170 rue Jules Janssen – ZAC de Kergaradec 29806 BREST Cedex 9 02 98 34 60 75 crd@ites-formation.com
entité de placement familial. La professionnalisation n'est somme toute qu'une étape sur la très longue route qui se dessine pour faire sortir les familles d'accueil de l'isolement et des incompréhensions parfois tenaces entre les assistants familiaux et les autres métiers du placement familial. [Extr. 4ème de couv.]

CAMBON Laurent . La professionnalisation des assistants familiaux. Paris : ESF, Mai 2013  Prenant appui sur l’expérience d’une association d’Ile-de-France, l’auteur invite à repenser les modalités de management des assistants familiaux afin d’intégrer leur professionnalisation, de modifier les représentations de métier et changer les pratiques des placements familiaux. A cet effet, il propose des outils de management abordant des préoccupations aussi diverses que la formation, la pluridisciplinarité des équipes, le recrutement, le management par les compétences et les objectifs, l’actualisation des outils 2002-2 mais aussi l’usure professionnelle, le rapport de monétarisation de l’accueil familial. [Extr. 4ème de couv.] 



JOIN-LAMBERT MILOVA Hélène. La famille d'accueil et l'enfant : Recherches sur les dimensions culturelles, institutionnelles et relationnelles du placement familial. Paris : L'Harmattan, 2010. (Coll. Savoir et formation Protection de l'enfance) 178p.
 La famille d'accueil a toujours représenté une forme de suppléance familiale. Cet ouvrage collectif a pour objet de relever les évolutions récentes de cette forme traditionnelle d'éducation et les enjeux qui se dessinent aujourd'hui. La dimension institutionnelle du placement familial, est abordée à travers deux chapitres portant d'abord sur l'évolution du cadre législatif et la professionnalisation des assistantes familiales en France, puis sur ses conséquences dans un service associatif innovant, dont le fonctionnement très souple a été soumis à rude épreuve. La dimension relationnelle, touchant au plus près les familles d'accueil et les enfants, est analysée dans les deux derniers chapitres. L'un s'intéresse à la construction des relations entre les enfants et leurs parents d'accueil dans un contexte de professionnalisation croissante, l'autre à la place occupée par les conjoints des assistantes familiales dont la fonction relationnelle est importante, mais le statut formel peu reconnu. [Extr. 4ème de couv.] 

WEIL Claire. L'accueil familial dans tous ses états. Paris : L'Harmattan, 2012. (Coll. Savoir et formation Education familiale) 180p.
 Cet ouvrage nous donne une lecture du placement familial originale et étonnante. Par les approches biographiques proposées, par l'exposé d'actions innovantes et créatrices, par leurs réflexions posées sur la formation, la professionnalisation, les auteurs nous font vivre l'hétérogénéité qui compose et structure l'accueil familial d'aujourd'hui. [Extr. 4ème de couv.] 

WEIL Claire. Les assistants familiaux : de la formation à la professionnalisation. Paris : L'Harmattan, 2010. (Coll. Savoir et formation) 170p.
 Cet ouvrage est l'occasion, pour l'ANPF (Association Nationale des Placements Familiaux) et l'ETSUP (École supérieure de travail social), de s'interroger sur les pratiques, de remettre en question les repères institutionnels et les responsabilités exercées de part et d'autre : services de placement familial et organismes de formation. Pas de certitudes arrêtées, mais des réflexions partagées avec des universitaires,
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des formateurs et des praticiens du placement familial, pour confronter les expériences, bousculer les pratiques et interroger les programmes de formation.  [Extr. 4ème de couv.]




Articles :
CROUZEL Michel. Accueil familial et travail d'équipe. Bulletin d'informations du CREAI Bourgogne, n°272, juillet 2007. 17p.
 L'auteur fait part de sa réflexion concernant la construction de l'identité professionnelle des assistants familiaux et leur place auprès des travailleurs sociaux. Il analyse la nécessité pour eux de travailler en équipe. 
 http://www.creaibourgogne.org/uploads/bulletins/archives/2007/272-07-1.pdf



GAUTHIER TRIPOUL Sylvie, ECUVILLON Nadia. La cothérapie institutionnelle. Un dispositif de soin innovant dans le cadre d'un placement familial. Le journal des psychologues, n°273, décembre 2009-janvier 2010. pp.69-73
 Parfois, la prise en charge d'un enfant et de son entourage nécessite une position dynamique de la part des équipes et de l'institution, qui peuvent alors être amenées à innover en matière de soins thérapeutiques. C'est le cas pour Leila et Madame C, pour qui un dispositif singulier a vu le jour, afin 


LE LABOURIER Stéphane. Les assistants familiaux en manque de reconnaissance. Actualités sociales hebdomadaires, n°2618-2619, 17 juillet 2009. pp.22-23
 Malgré la mise en place d'un cadre professionnalisant, l'intégration réelle des assistants familiaux dans les équipes de l'aide sociale à l'enfance est à la peine, pointe Stéphane Le Labourier, assistant de service social en polyvalence de secteur et auteur d'une recherche sur ce métier. [Extr. intro]

ROUFF Katia. Les assistants familiaux se font une place. Lien social, n°1086, 13 décembre 2012. pp.10-16
 Près de 49 000 assistants familiaux accueillent de façon continue des mineurs ou des jeunes majeurs confiés par les services de la protection de l'enfance. La réforme de 2005 leur confère un statut de travailleur social. Leurs collègues assistants de service social ou éducateurs spécialisés ne partagent pas toujours cette position, même si les choses progressent. [Extr. intro.]

assistant familial, une profession comme les autres ?

Assistant familial : une profession comme une autre ?

Paru dans Actualités Sociales Hebdomadaires, N° 2687 du 17/12/2010 Rubrique : Décryptage Auteur(s) : HELFTER CAROLINE

ENFANTS EN DIFFICULTÉ
Assistant familial : une profession comme une autre ? Accueillir dans son foyer des enfants en difficulté et les élever comme s’ils étaient les siens – en se souvenant bien qu’il n’en est rien : tel est le défi que relèvent les femmes, et de plus en plus les hommes, qui font profession d’assistant familial. Nouvellement adoubés sur la scène du travail social, ces professionnels ayant à conjuguer l’intime et l’institutionnel, l’engagement affectif auprès des enfants confiés et l’inscription dans un travail d’équipe, exercent un métier tout à fait singulier.
Autrefois nourrices, puis assistantes maternelles, elles – et ils – sont désormais des assistants familiaux, c’est-à-dire des travailleurs sociaux exerçant « une profession définie et réglementée d’accueil permanent à [leur] domicile et dans [leur] famille de mineurs ou de jeunes majeurs de 18 à 21 ans » (1). En quittant le champ « maternel » pour le champ « familial », adjectif largement utilisé dans le secteur social, l’assistant familial rejoint un groupe de professions ayant pour point commun la relation d’aide dans le domaine de la famille – comme celles de technicien en intervention sociale et familiale, de conseiller en économie sociale et familiale, de médiateur familial ou encore de conseiller conjugal et familial, fait observer Serge Escots, anthropologue et thérapeute familial, lors des XIXes journées d’étude de l’Association nationale des placements familiaux (ANPF) (2). « Ainsi, dans ce que veut donner à entendre l’appellation « assistant familial », la dimension sémantique materno-familiale se réduit au profit de la dimension professionnelle », estime-t-il. Ce changement n’est pas seulement d’ordre lexical, puisque la professionnalisation de l’accueil familial est assise sur une formation sanctionnée par un diplôme d’Etat. Aucun autre métier, cependant, ne connaît une telle intrication du professionnel et du privé, note Anne Thévenot, maître de conférences en psychologie clinique à l’université de Strasbourg. Non pas tant parce que les assistants familiaux exercent leur activité à domicile, mais parce que c’est le quotidien de leur vie familiale, avec ses particularités et ses limites, qui constitue l’essence même de leur travail, et parce que les fonctions parentales que les intéressés remplissent auprès des enfants en difficulté sont ancrées dans le terreau d’un engagement subjectif tout à fait essentiel. Véritable « cœur de métier de l’accueil familial, fût-il professionnalisé », cette implication affective est propice à l’identification des besoins de l’enfant avec qui s’établit un partage des moments de vie, souligne Vincent Ramon, président de l’ANPF. L’époque semble d’ailleurs révolue où il était demandé aux accueillantes de « ne surtout pas s’attacher aux enfants confiés » – quoique… (voir l’encadré, page 31). En fait, commente Catherine Sellenet, professeure en sciences de l’éducation à l’université de Nantes, la demande faite aux assistants familiaux est plus complexe que cela, explique la spécialiste : « Il s’agit de s’attacher à l’enfant, il en aura besoin pour grandir, mais de façon non pathologique, non fusionnelle, en laissant la place ouverte aux parents »(3). Autrement dit, selon la belle adresse à ses salariées de Chantal Delos, directrice du service de placement familial spécialisé du Comité mosellan de sauvegarde de l’enfance et de l’adolescence : « Il faut faire avec les enfants comme si c’étaient les vôtres, sans oublier jamais qu’ils ne le sont pas. »

Les ratés du dialogue

« Offrir une relation d’attachement dans l’intimité de sa famille et être inclus dans un cadre institutionnel professionnalisé » : telle est bien, pour Vincent Ramon, la « dualité contradictoire » sur laquelle repose le métier d’assistant familial. Une dualité qui expose les assistants familiaux à un droit de regard de l’institution sur leur vie personnelle. Cela ne va pas sans tiraillements avec l’équipe référente du placement. D’une part, parce que « la qualité de la transparence d’un propos est très relative, elle relève d’une illusion se heurtant à l’impossibilité de rendre visible et audible une activité qui se vit dans le menu du quotidien, l’habituel, et se ressent avant de se démontrer », explique Catherine Salvat, psychologue du travail à l’association Via Voltaire, qui intervient dans l’accompagnement des assistants familiaux du conseil général de l’Hérault. D’autre part, parce que « la mise en visibilité de l’action de l’assistante familiale se fait sous la pression des attendus de genre, des normes sociales, politiques, psychologiques, légales », qui encadrent le soin et l’éducation des enfants. Autrement dit, s’il est impossible de définir avec certitude ce que serait un bon accueil familial – « avec une pincée d’attachement, un nuage d’attention maternelle, un zeste de compassion et des sollicitations éducatives variées… » –, une chose est sûre : tout n’est pas bon à dire dans l’espace social, et en particulier les affects négatifs qui viennent « contredire l’idéal maternel féminin attribué aux métiers de l’enfance », précise Catherine Salvat. D’où les « stratégies d’enjolivement » qu’elle constate chez les assistants familiaux. Repérant vite les représentations et attentes des équipes référentes de la situation de l’enfant, qui sont variables d’une équipe à l’autre, les accueillants y ajustent leur discours et ils lissent l’image qu’ils donnent de leur travail. Ce à quoi font écho les regrets des travailleurs sociaux déplorant régulièrement que les assistants familiaux mentent ou, à tout le moins, leur cachent certaines choses. Il y a aussi un problème d’accordage entre les « temporalités dissonantes » de l’accueil familial et de l’institution, ajoute Catherine Salvat. Les événements qui jalonnent la vie de l’enfant accueilli se manifestent de façon impérieuse. Or l’institution oppose une certaine inertie aux demandes des assistants familiaux confrontés aux besoins et/ou au malaise de l’enfant. Les professionnels, bien sûr, continuent malgré tout à agir, ou bien, si nécessaire, temporisent et diffèrent. Mais, « exaspérés par les fins de non-recevoir qui ajoutent à l’usure du quotidien – et blessés quand leurs interpellations sont minorées –, ils en arrivent à questionner leur propre capacité d’expression : “ont-ils les bons mots ?” » Ces ratés du dialogue avec l’institution renvoient l’assistant familial à sa « condition de travailleur solitaire, éloigné de l’organisation dont le soutien ne lui est pas toujours acquis, alors même que l’exercice de l’accueil familial requiert la possibilité d’un échange avec un tiers soutenant, qui puisse entendre et accueillir l’expression des aléas ». Des aléas qui sont légion, commente Catherine Salvat, car l’enfant n’est jamais là où on l’attend : il importe et revit dans sa famille d’accueil « les dysfonctionnements relationnels de sa propre famille, il vient questionner la solidité des aménagements, il refuse les marques d’attention et met à bas la patience ». Précisément, parce que ça ne va pas « tout seul » d’accueillir un enfant en grande difficulté, l’intégration des assistants familiaux aux équipes pluridisciplinaires du placement est unanimement posée comme une nécessité. Sur le terrain, pourtant, cette place de « collègue » est loin d’être partout gagnée. « Il est très difficile d’instituer un système de confiance entre l’assistant familial et l’équipe, on se sent jugé et jaugé, comme si on ne faisait pas partie de l’équipe », témoigne une professionnelle, qui exerce dans un service de placement associatif en région parisienne. Or combien de placements sont mis à rude épreuve du fait que l’assistant familial ne parle pas des problèmes rencontrés par crainte de passer pour un incapable ? « Le mythe de la compétence fait ici ses dégâts, nous privant du seul outil disponible en accueil familial qui, bien que limité, soit un peu efficace : la parole », affirme Serge Escots, qui juge essentiel de réfléchir aux moyens d’améliorer la qualité des échanges à l’intérieur du dispositif. « Chacun sait par expérience que lorsqu’il y a un problème dans la pratique, une bonne façon d’éviter d’en parler consiste à nommer un bouc émissaire », ajoute-t-il. Les assistants familiaux récemment diplômés lui semblent pouvoir faire de valables candidats à ce poste. « A moins que, forts de cette légitimité nouvelle, ils profitent de ce pouvoir pour désigner un responsable de tous les maux… »
Alors que les premières formations qualifiantes d’assistants familiaux viennent de s’achever, il semble en tout cas rester bien du chemin à faire pour équilibrer la relation entre ces professionnels et les travailleurs sociaux canoniques. A cet égard, le partage de connaissances théoriques et un langage commun ne suffisent pas. Il s’agit aussi de travailler sur la reconnaissance de l’autre comme d’un égal, analyse Séverine Euillet, maître de conférences en sciences de l’éducation à l’université Paris-X. Mais, avec des travailleurs sociaux qui sont à la fois accompagnateurs et contrôleurs de la situation d’accueil, cette reconnaissance se heurte à la hiérarchie des statuts. « Dans un travail d’équipe, chaque professionnel a une place, la question est de savoir quelle place est attribuée, laissée et prise », développe la chercheuse. Pour l’assistant familial, au-delà de son absence de place physiquement identifiée comme telle dans les locaux du service, « il y a la place de sa parole et de ses observations, par conséquent la place de son travail et la reconnaissance de l’importance de celui-ci selon que son discours est, ou non, recueilli et pris en compte dans les orientations décidées pour l’enfant », explique Séverine Euillet. C’est bien là où le bât blesse. Alors que le quotidien des enfants, ce sont les assistants familiaux qui le vivent 24 heures sur 24, les intéressés ont souvent le sentiment d’être renvoyés à la marge du dispositif.
Professionnaliser l’ensemble du dispositif d’accueil En fait, comme sur un échiquier où le déplacement d’une pièce reconfigure la totalité du jeu, le nouveau positionnement des assistants familiaux implique une remise à plat générale des rôles et des fonctions de tous les professionnels composant les équipes pluridisciplinaires de placement. Il s’agit de faire émerger et reconnaître par ses pairs la spécificité de chacun, souligne la chercheuse. Un tel projet revient, finalement, à professionnaliser l’ensemble du dispositif d’accueil, car il suppose que tous les intervenants se forment pour pouvoir partager avec les autres leur « “profession” de l’accueil familial », fait observer Serge Escots. Et de préconiser, à cet effet, des formations pluriprofessionnelles, qui réuniraient assistants familiaux et autres protagonistes de l’accueil, ainsi que des dispositifs communs d’analyse des pratiques. A la lumière de leur expérience de psychologues à l’aide sociale à l’enfance, respectivement en Meurthe-et-Moselle et dans le Bas-Rhin, Jutta de Chassey et Francine Renault sont également convaincues qu’on ne peut bien comprendre ce qui se joue dans la rencontre toujours singulière avec un enfant sans analyser les enjeux subjectifs qui sont les ressorts du placement. Cette analyse ne doit pas être le seul fait des assistants familiaux, insistent-elles : travailleurs sociaux référents, cadres chargés des décisions, juges, psychologues, ont eux aussi à travailler sur leur subjectivité. En effet, « que ce soit dans la vie quotidienne commune, dans l’accompagnement, ou dans l’arbitrage décisionnaire, la situation de suppléance auprès d’un enfant a le pouvoir de faire émerger des enjeux infantiles pour chacun. Or ces enjeux, surtout s’ils ne sont pas identifiés, risquent d’alimenter des positions, convictions ou idéologies qui coloreront “l’intérêt de l’enfant” au nom duquel des décisions et des orientations seront prises », soulignent les psychologues. Mais encore faut-il que les services de placement soutiennent la nécessité de tels espaces d’élaboration et prévoient la possibilité concrète d’y participer sur le temps de travail. Or cela ne semble pas constituer le premier souci des institutions. Introduire de la cohérence entre les différentes parties prenantes, tel est le défi de cette aventure peu banale consistant à aider un enfant à grandir dans une autre famille que la sienne. « Pour qu’une entente de parentalité partagée soit une mesure bénéfique plutôt qu’une source de confusion, il est nécessaire que tous les adultes aient une position claire et acceptent ce qui constitue leur rôle respectif dans la vie de l’enfant, en évitant la compétition pour se gagner l’allégeance de celui-ci », explique Catherine Sellenet, qui souscrit ici à un propos du psychiatre canadien Paul Steinhauer. La professionnalisation des assistants familiaux peut contribuer à cette clarification, mais elle n’est pas à elle seule en mesure d’y suffire : la suppléance est un art qui se pratique collectivement.

UNE INTERVENTION TRUFFÉE DE CONTRADICTIONS
Représentant le principal mode d’accueil des enfants confiés à l’aide sociale à l’enfance (ASE), les assistants familiaux reçoivent dans leurs foyers quelque 65 900 jeunes – pour 47 800 qui sont confiés à des établissements (4). Si l’accueil familial est ainsi privilégié, c’est certainement lié à la « croyance » plus ou moins établie, « qui tend à assimiler le bon soin du côté de la famille d’accueil et la carence du côté de l’institution », analyse Serge Escots, anthropologue et thérapeute familial. On peut ajouter que, financièrement, les familles d’accueil pèsent nettement moins lourd que les établissements sur les budgets des conseils généraux (5). Pour autant, le placement familial représente une intervention qui n’a rien d’évident. Catherine Sellenet, professeure en sciences de l’éducation à l’université de Nantes, pointe plusieurs paradoxes inhérents à cette formule de soutien aux enfants (6). Le premier d’entre eux est de chercher à protéger l’enfant de sa famille tout en voulant protéger ladite famille, c’està-dire ne pas annuler la place des parents. En vertu d’une « idéologie familialiste » qui pose la primauté de la famille, cette dernière « apparaît donc comme un risque nécessaire : elle est à la fois dangereuse tout en étant incontournable ». Ce qui ne va pas sans poser problème aux acteurs de terrain, dans la mesure où ils ont l’impression qu’on leur demande de « protéger l’enfant de sa famille qui reste la meilleure solution », souligne Catherine Sellenet. Une deuxième contradiction tient au fait de vouloir s’appuyer sur les compétences parentales après avoir bien mis en évidence les défaillances justifiant le placement. « Peut-on dire à un parent qu’il reste un “expert de son enfant” alors qu’un jugement vient de lui dénier ce statut ? De qui se moque-t-on ? », ironise la spécialiste. Elle invite donc à ne pas s’étonner que les premières compétences attendues par les professionnels de la protection de l’enfance soient celles du parent à reconnaître ses difficultés et à adhérer à l’analyse qui est faite de sa situation. Corollaire de cette contradiction, l’antinomie qui existe entre le partenariat, toujours plus invoqué, et le contrôle, qui ne laisse pas de se métamorphoser. Ainsi, la loi de mars 2007 réformant la protection de l’enfance, qui vise à la déjudiciarisation des situations, prône l’adhésion des familles, cependant que prolifèrent de nouvelles manières de les surveiller comme les visites médiatisées. Les deux derniers paradoxes évoqués par Catherine Sellenet sont particulièrement dérangeants. Le placement, explique-t-elle, vise, d’une part, à « trancher pour réparer », d’autre part, à « séparer pour réunir ». Or, si la séparation peut apparaître effectivement comme « une coupure salutaire, un espace-temps “thérapeutique” susceptible de redistribuer les cartes », encore faudrait-il qu’il y ait un réel suivi des parents post-placement. Mais, une fois l’enfant protégé, on braque le projecteur sur son lieu d’accueil et les parents qui ont été jugés défaillants sont souvent laissés dans l’ombre. De ce fait, « la réunion ou le retour de l’enfant dans sa famille prend parfois l’allure d’un mythe, d’un rêve merveilleux et fou que les parents se racontent et racontent à leur enfant au gré des rencontres, non sans susciter les reproches des professionnels qui voient là une marque d’immaturité supplémentaire, ou de perversité », commente Catherine Sellenet. D’ailleurs, combien d’enfants quittent-ils réellement leur famille d’accueil pour revenir chez leurs parents ? Nul ne le sait : la France ne tient pas de statistiques sur ce qu’elle pose pourtant comme un principe acquis, à savoir que tout placement implique un retour. « Séparer pour réunir serait-il un vœu pieux qui masquerait la violence de l’intervention ? », s’interroge l’experte.

DES HOMMES QUI ENTRENT DANS LA CARRIÈRE
Les hommes sont-ils des assistants familiaux comme les autres ? Au vu de la (relative) masculinisation du métier à laquelle on assiste, Claire Weil, responsable pédagogique de la formation initiale des assistants familiaux à l’Ecole supérieure du travail social (ETSUP/Espace enfance), et Anne Olivier, sociologue, ont cherché à le savoir. Ayant recensé, en 2009, 51 candidats (pour 381 candidates) au diplôme d’Etat d’assistant familial (DEAF) dans les régions Centre et Ile-de-France – alors qu’il n’y en avait eu aucun en 2008 –, les chercheurs ont voulu connaître les
motivations de ces hommes. Agés de 55 ans en moyenne, ils se révèlent être tous les conjoints d’une assistante familiale. A la différence de la majorité de leurs épouses, ces assistants familiaux ont eu, auparavant, une autre vie professionnelle. Leur réorientation est due, pour certains, à une nécessité (chômage, maladie), pour d’autres à la lassitude d’exercer une activité qui leur paraissait peu porteuse de sens. C’est la nouvelle reconnaissance de cette profession par une formation qualifiante et diplômante qui a été pour tous l’élément déterminant de leur choix. « L’accès à un diplôme signifie pour eux, encore plus que pour les femmes, l’accès à un “vrai métier”, avec une responsabilité éducative au quotidien », soulignent les chercheuses. Du point de vue de pères d’accueil devenus assistants familiaux, c’est dans cette responsabilité que se situe la différence entre les deux statuts, estiment Claire Weil et Anne Olivier. Le père d’accueil, en effet, s’investit dans une fonction éducative à la mesure dont il s’en sent porteur et/ou que sa conjointe projette sur lui, mais ce n’est pas à lui qu’il revient d’exercer les droits et devoirs d’un acteur de premier plan. Précisément, leur place au sein d’une équipe est d’emblée, pour les assistants familiaux, une évidence et un droit. Du coup, les intéressés n’évoquent pas de problèmes d’intégration, à la différence des assistantes familiales avec lesquelles ils suivent leur formation : ces dernières sont majoritaires à aborder la notion d’équipe sous l’angle de difficultés vécues personnellement. En outre, ceci contribuant sans doute à expliquer cela, les hommes n’ont pas peur d’être jugés par leurs collègues. A cet égard, il y a un véritable fossé entre les professionnels hommes et femmes, font observer Claire Weil et Anne Olivier, qui s’interrogent sur une possible intégration différenciée des premiers et des secondes par les services. Les trajectoires antérieures des assistants familiaux les ont peut-être également préparés à se sentir légitimes dans un travail d’équipe, avancent-elles. La conception que les représentants des deux sexes ont de leur rôle dans ladite équipe varie beaucoup. Les deux tiers des candidates au DEAF se focalisent sur la communication des observations du quotidien. Accroître leur capacité à restituer ces informations constitue d’ailleurs une demande des femmes fréquemment formulée en formation. Les hommes, en revanche, n’ont pratiquement pas le souci de bien communiquer. Ils se représentent leur rôle de façon à la fois plus diversifiée et plus ancrée dans une dimension décisionnelle. Les assistants familiaux font aussi une description plus complexe et étayée que les assistantes familiales des différentes fonctions de l’équipe et ils font état d’attentes précises à son égard. Par exemple, « comprendre et obtenir des réponses sur les motivations des équipes éducative et judiciaire à placer un enfant en famille d’accueil plutôt qu’en foyer ». Sur un plan personnel, enfin, « la formation amène tous les assistants familiaux à exprimer quelque chose qui a à voir avec une petite révolutionidentitaire », soulignent Claire Weil et Anne Olivier : ils se disent beaucoup plus ouverts qu’auparavant à une remise en question d’eux-mêmes et à l’expression de leurs émotions, ils questionnent leur position au sein de leur famille et revendiquent de se dégager des stéréotypes qui réservent la tendresse aux mères et l’autorité aux pères. La formation a eu pour effet de rendre ces professionnels « plus patients, moins exigeants, plus dans la communication, l’observation, l’écoute ». Ces métamorphoses échapperaient-elles aux responsables des services de placement ? Pour l’heure, en tout cas, aucun des hommes interrogés ne s’est vu confier de tout-petits. Tous accueillent des préadolescents ou adolescents, à l’exception d’un assistant familial et de sa conjointe, qui reçoivent de jeunes mères avec enfants.