vendredi 30 mars 2018

INFO

11 ASSISES DE LA PROTECTION DE L’ENFANCE
JEUDI 28 ET VENDREDI 29 JUIN 2018


CITÉ DES CONGRÈS DE NANTES
les VoIsIns
ORGANISÉES PAR LE JOURNAL DES ACTEURS SOCIAUX
EN COLLABORATION AVEC L’ODAS
ET LE CONSEIL DÉPARTEMENTAL DE LOIRE-ATLANTIQUE


les accueillants
les
grands-parents
les parrains
les amis
les parents
Partir des besoins de l’enfant pour mieux évaluer sa situation
puis mieux l’accompagner semble une évidence, mais ce
n’est pas si simple à mettre en oeuvre. Cela requiert de
pouvoir les évaluer en fonction de contextes toujours
singuliers. Cela implique de mieux identifier et de mieux
valoriser les ressources des diverses familles (qu’elles soient
de sang ou de coeur) qui entourent – ou sont susceptibles
d’entourer – l’enfant. Et pour y parvenir, dans un contexte
suscitant d’importantes tensions et diverses formes de
découragement, les institutions doivent donner l’exemple
en inventant de nouveaux modes de coopération.

Dans la famille
“jeprotègelenfant”
je voudrais…
tous ceux qui répondent
à ses besoins


es modes de vie et configurations familiales ont considérablement évolué ces dernières années
en même temps que l’univers socio-économique, juridique, environnemental ou technologique.
Les repères éducatifs en sont bouleversés. Chacun mesure donc aujourd’hui l’urgence d’une
adaptation des pratiques professionnelles pour mieux accompagner les jeunes et leurs parents.
C’est pourquoi, la loi du 14mars 2016 a explicitement placé la notion de besoins de l’enfant au coeur
de l’approche de notre politique de protection de l’enfance. Cela appelle un changement de paradigme
pour transformer les regards sur la parentalité et l’environnement de l’enfant. Avec pour conséquence
de réformer les pratiques en matière d’évaluation des besoins de l’enfant (en prévention comme en
protection), en matière de travail avec l’enfant lui-même, les parents et/ou les autres acteurs éducatifs
autour de l’enfant, et en ce qui concerne les modes de coopération entre institutions.
Il faut donc maintenant préciser les modalités de cet indispensable changement et les moyens d’y parvenir
dans un contexte difficile sur les plans financier et institutionnel.
C’est ce que propose de faire la 11e édition des Assises nationales de la Protection de l’Enfance avec
l’ambition de contribuer à bâtir une protection de l’enfance 3.0, prometteuse pour les enfants,
motivante ou re-motivante pour ceux dont c’est le métier, et mobilisatrice pour les autres dont c’est
aussi la responsabilité.

jeudi 29 mars 2018

formation

Du 31 mai au 1er juin | (75) PARIS

Faire une place à l’enfant placé


Entre contraintes et désir, place à la créativité
Journées d’étude organisées par l’atelier de recherche sur l’avenir de l’accueil familial (L’atelier 2af).
Association créée en 2012 à la suite du groupe de recherche sur le placement familial du GRAPE. Ses membres se proposent, à partir des pratiques et de leur théorisation dans tous les domaines de la protection de l’enfance, de développer la recherche sur l’avenir du Placement Familial, afin de contribuer à lui donner une dimension de soin au-delà de l’hébergement, d’améliorer les conditions de vie et d’accueil des enfants, en portant une attention particulière aux parents et aux familles d’accueil.
Programme
Inscriptions : Denise Bass : atelier2af@orange.fr
Tél. : 06 11 39 82 61
••••••••••••••••••••••••••••
Jeudi 31 mai de 8h30 à 18h
et vendredi 1 juin de 8h30 à 13h
Maison des associations solidaires
10/18 rue des Terrres au Curé – 75013 Paris

info Lien Social

28 mars 2018

Départements : la place prépondérante du secteur social et médico-social


Les personnels du secteur de l’action sociale et médico-sociale représentent 40% des effectifs des conseils départementaux, selon une récente étude de la Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (DREES)*. Ainsi, 78 200 agents travaillent pour l’action sociale et médico-sociale : plus de 29 000 sont des personnels socio-éducatifs, essentiellement des assistants sociaux, éducateurs spécialisés et conseillers en économie sociale et familiale, 12 000 sont agents médicaux et paramédicaux – médecins, sages femmes, puéricultrices, infirmiers – et 1 800 sont psychologues. Enfin, près de 35 000 sont des agents techniques et administratifs.
37 000 assistants familiaux
Il faut ajouter à ces chiffres les 36 700 assistants familiaux employés directement par les Conseils départementaux et qui se voient confier l’accueil permanent à leur domicile de mineurs ou de majeurs de moins de 21 ans. C’est donc au total près de 115 000 personnes employées au titre de l’action sociale et médico-social.
Une organisation différente sur chaque territoire
Ces chiffres globaux ne doivent pas masquer la forte différence entre les départements pour l’organisation des services. Ainsi, certains ont préféré la mise en place de services spécialisés quand d’autres se sont organisés autour d’un service social polyvalent. L’action sociale polyvalente regroupe en moyenne 30% des effectifs. Les secteurs de la protection de l’enfance et de la Protection maternelle et infantile (PMI) réunissent chacun 17% des agents, celui des personnes âgées 13% et de l’insertion 9%.
Services polyvalents et PMI
Les professionnels sociaux et éducatifs sont majoritaires dans les services polyvalents (50%) et à l’Aide sociale à l’enfance (ASE) (27%). Les psychologues interviennent principalement au sein de l’ASE (47%) et de la PMI (27%). Enfin, la présence des personnels techniques et administratifs est plus forte dans les services accompagnant les personnes âgées et les personnes en situation de handicap (69% des effectifs).
*DREES, 115 000 personnes travaillent en 2016 dans le secteur de l’action sociale et médico-sociale des départements, Études et résultats n° 1054, mars 2018

colloque

11EME ASSISES NATIONALES DE LA PROTECTION DE L’ENFANCE


du jeudi 28 au vendredi 29 juin 2018
28 juin 12h-19h/29 juin 08h30-17h30

Chaque année les Assises Nationales de la Protection de l’Enfance réunissent les acteurs professionnels de ce secteur dans leur diversité (magistrats, travailleurs sociaux, éducateurs, …) pour échanger en présence des personnalités les plus qualifiées et experts de terrain sur les grands enjeux en matière de protection de l’enfance.
Des travaux en séances plénières et en ateliers thématiques sont proposés.
Cette 11e édition est organisée en partenariat avec le Département de Loire-Atlantique ainsi que les principales institutions nationales concernées membres du comité de pilotage des Assises.
Salon professionnel / entrée payante : 350 euros

  • Contact : Marie-José LOPEZ / Maria LILLO
  • E-mail : assises@lejas.com
  • Site : http://www.lebpe.fr
  • Réservation : 0153102410

jeudi 15 mars 2018

ENQUETE FNAF, MANQUE ASSISTANTS FAMILIAUX

La profession « Assistant Familial » s’essouffle. La FNAF est régulièrement interpellée par des employeurs qui ont de la peine à recruter des assistants familiaux. Les effectifs ne cessent de baisser quel que soit l’employeur ou la région concernée. La FNAF a réagi à ce constat en réalisant une enquête auprès de ses adhérents. Nous remercions les 10,65% d’adhérents ayant répondu et qui contribuent de fait à l’évolution de notre métier et des pratiques en placement familial.

Une première analyse des réponses, démontre que :

✓ Peu d’employeurs mettent en place une procédure pour le respect de la présomption d’innocence.
La parole de l’enfant prime sur celle du professionnel. Dans le doute, malgré un dossier administratif où aucun élément à charge n’apparaît, le Président du Conseil Départemental préfèrera effectuer le retrait de l’agrément d’un assistant familial par mesure de précaution. 
Certaines « affaires » seraient-elles encore dans l’esprit des Présidents ?

✓ Peu d’assistants familiaux ayant répondu se sentent reconnus par leurs employeurs
Ces travailleurs sociaux se sentent jugés dans l’exercice de leur profession. Les accueils dits « complexes » impactent la vie quotidienne de la famille d’accueil. L’assistant familial s’épuise, il doit argumenter avec force pour percevoir une majoration de salaire appelée « sujétion exceptionnelle ».  L’assistant familial se doit d’être compétent dans tous les types d’accueil et ce, sans formation préalable ! Paradoxe : quel est le travailleur social, recruté par un service de protection de l’enfance, qui effectue sa mission d’éducateur spécialisé, de psychologue, d’assistant social, etc sans avoir, au préalable, été formé ???

✓ Les entretiens professionnels permettent peu aux assistants familiaux d’évoquer leurs ressentis professionnels
Malgré des améliorations, l’assistant familial ose peu évoquer les difficultés rencontrées au sein de l’équipe alors que sa place est régulièrement ignorée et pour exemples : calendriers des visites élaborés sans consultation, les décisions prises pour le projet de l’enfant sans concertation ni discussion préalable,..

. ✓ Protection et sécurité de l’assistant familial et de sa famille : peu ou pas de communication par les services
La plupart des assistants familiaux ignorent l’existence du registre de santé et sécurité au travail et si un(e) assistant(e) de prévention a été mis en place. Peu d’employeurs ont réalisé une fiche risque pour le métier d’assistant familial.


La FNAF s’inquiète du devenir de la profession et pour l’avenir des enfants dont de plus en plus sont placés au domicile des parents et craint, à court terme, le manque de solutions pour confier les enfants dont les services ont la garde.

Monsieur Emmanuel MACRON, président de la république, vient de recevoir une lettre de la FNAF qui alerte sur la précarité de la profession, le manque de structures de soin pour les enfants qui en ont besoin, la recrudescence des agressions au sein des familles d’accueil, les burn out, le vieillissement de la profession avec peu de relève, etc.

STATUT
Notre statut particulier doit changer car : • L’assistant familial, contractuel, ne peut bénéficier de la prime d’intéressement à la performance (Circulaire n°INTB1234383C) car les statuts particuliers en sont exclus • Certaines banques refusent le prêt pour l’assistant familial pour le motif qu’il relève d’une profession précaire malgré le contrat de travail en CDI.  

BIBLIOGRAPHIE

L'ENFANT EN SITUATION DE HANDICAP

Les acteurs du placement familial témoignent
Claire Weil
Réseau Tessitures
SANTÉ, MÉDECINE HANDICAP SOCIOLOGIE FAMILLE TRAVAIL SOCIAL France



Accueillir un jeune en situation de handicap invite chacun à témoigner : parents, assistantes familiales, jeunes, membres des équipes techniques, formateurs... Ils parlent avec simplicité et authenticité des difficultés et des petits bonheurs qu'apportent ces rencontres au long cours. Entre humour, analyse et réflexion, chacun nous livre sa vision de l'accompagnement, évoque ses difficultés et les trouvailles pour les contourner. Ces témoignages émouvants et originaux viennent poser un regard critique et constructif sur les apports de cette communauté de travail.



Claire Weil fut psychologue clinicienne durant 30 ans dans divers PFS, formatrice à Espace-Enfance, puis responsable pédagogique pendant 10 ans de la formation des assistants familiaux à l'ETSUP. Elle a écrit différents articles et ouvrages sur le placement familial (weil.claire@orange.fr).





LES GRANDES PERSONNES SONT VRAIMENT STUPIDES

Comment soigner les blessures psychiques d’un enfant maltraité ? Comment redonner de la sécurité à un enfant délaissé ? Comment aider un enfant et ses parents à créer un lien affectif ? Comment un enfant adopté peut-il conjuguer ses vies successives ? Confronté à des parents incapables d’affection, dépressifs, absents ou exclus, l’enfant peut en arriver à se replier sur lui-même, à manifester une peur panique de l’abandon, à être violent ou à ne plus pouvoir s’exprimer ni par les mots, ni par les gestes.

Pédopsychiatre depuis 25 ans, le Dr Daniel Rousseau intervient au foyer de l’enfance du Maine-et-Loire depuis 20 ans

mardi 13 mars 2018

lien entre l'ASE, le soin, la PJJ ...

À Besançon, une panoplie de réponses

Dans le Doubs, la prise en charge spécifique, tournée vers le soin ou l’errance, remonte déjà à dix ans.
Dans le Doubs, le conseil général privilégie une logique de réseau autour des jeunes qui ne rentrent dans aucune case (lire l’interview de Michel Botbol, psychiatre). Chaque mois, une réunion animée par l’aide sociale à l’enfance et la PJJ rassemble les acteurs concernés (psychiatres, instituts spécialisés, éducation nationale…) pour échanger sur des situations individuelles et tenter de trouver des solutions articulées : l’adolescent est confié une partie du temps à telle institution, une partie du temps à telle autre.
Ces « groupes techniques d’orientation » peuvent notamment faire appel à deux services innovants du centre éducatif l’Accueil, géré par l’ADDSEA (Association départementale du Doubs de sauvegarde de l’enfant à l’adulte) : l’un allie, comme les établissements de Suresnes et de Fleurey-sur-Ouche, champs éducatif et thérapeutique, l’autre se propose d’accompagner des jeunes en errance sans forcément passer par l’hébergement.
L’unité médico-éducative pour adolescents (UMEA) a ouvert fin 1999 pour accueillir des jeunes en crise au titre de la protection de l’enfance et de l’ordonnance de 1945 [2]. « Sa création sur le plan administratif a été extrêmement simple », assure le directeur, Eric Simon : une convention partenariale a entériné le déploiement d’un service extérieur du CHU au sein d’une des trois unités de vie du centre éducatif. Un psychiatre à mi-temps, un psychologue à tiers-temps, un cadre infirmier à temps très partiel et trois infirmiers ont ainsi rejoint une équipe de cinq éducateurs et une maîtresse de maison.
Sur le terrain, en revanche, il a fallu deux ans de préparation avant l’ouverture, une étape longue mais indispensable selon Eric Simon qui insiste sur la nécessité de travailler sur deux plans parallèles : un groupe politique et financier, composé des autorités concernées (justice, conseil général, PJJ, DDASS, DRASS, agence régionale d’hospitalisation…), et un groupe technique, professionnel (psychiatre, psychologue, cadre infirmier, ADDSEA). Ces derniers ont profité de ce temps pour apprendre à se connaître, confronter leurs discours, visiter ensemble d’autres établissements. « Ça ne pouvait pas marcher tout seul parce qu’éducateurs et personnel médical ne parlent pas la même langue, constate Eric Simon. Il n’y a pas de recette pour créer une telle structure. Le seul conseil que je peux donner est de respecter cette phase d’apprentissage. »
Après trois ans d’expérimentation, l’unité de sept lits, une place en studio et deux en accueil de jour a été pérennisée. Elle s’est intégrée dans le dispositif franc-comtois. D’abord conçue elle aussi pour des séjours temporaires, elle laisse désormais plus de temps aux jeunes qui en ont besoin : plusieurs mois, voire plusieurs années. « On avance en marchant, précise le directeur. On repense régulièrement l’organisation. » Derrière le fonctionnement « classique » (ateliers, réunions, synthèses, analyse de la pratique…), un principe : les personnels des deux champs ne sont pas interchangeables, chacun doit garder sa spécificité tout en travaillant de conserve.
L’UMEA ne se prétend pas «  dernière chance  » pour ces jeunes au parcours fracturé : « Notre équipe ne baisse pas les bras à la première difficulté, mais nous ne pouvons pas répondre à tous les problèmes. Nous savons aussi reconnaître quand nous ne réussissons pas. Nous avons simplement ajouté un maillon spécifique dans la prise en charge. » L’UMEA a aussi une fonction d’évaluation : un séjour peut servir à trouver la meilleure orientation possible. Pour repartir sur de meilleures bases.
Créé il y a dix ans, le service d’accompagnement éducatif et social (SAES) vise lui aussi, mais de façon très différente, des jeunes qui n’ont pas pu s’adapter à une structure : les quatre éducateurs suivent les adolescents, souvent en errance, là où ils se trouvent, en chambre d’étudiant, à l’hôtel ou en squat. « L’accompagnement ne peut pas être réduit à l’hébergement, estime Eric Simon. Si on place un gamin toxico qui vit en squat directement dans un foyer, il va fuguer, c’est sûr. » L’équipe jongle avec les aléas d’un parcours erratique, mais ne lâche pas, malgré les risques que comporte ce suivi à distance : « On n’est pas dans la surveillance. On ne va pas aller vérifier où tel jeune se trouve à 22 heures, et pourtant la responsabilité nous incombe. » Les adolescents sont incités à prendre leur vie en main, mais sont tenus à des rencontres régulières avec l’équipe. Dix studios disséminés dans la ville permettent à ceux qui se sentent prêts de trouver un endroit où se poser.
Que deviennent les jeunes qui sortent de l’UMEA et du SAES ? « Dans la plupart des cas, la crise finit par passer, dit Eric Simon. Quant à savoir si elle serait passée sans nos services… » Ici aussi, on évoque le travail de pacification, considérable dans certains cas. « À condition, prévient le directeur, de considérer que l’adolescence n’est pas une période de tranquillité. Mais notre société est-elle encore capable de supporter l’agressivité inhérente à cet âge de transition ? »

Une maison aux petits soins

Près de Dijon, un foyer s’efforce depuis trois ans de trouver de nouvelles approches éducatives grâce à la présence d’une équipe thérapeutique.
C’est une maison bourgeoise dans un joli village des environs de Dijon. Une maison imposante et calme. De l’extérieur, seule la porte cassée de la véranda témoigne d’un quotidien parfois tendu et conflictuel.
Ici, à l’Unité éducative et thérapeutique (UET) de Fleurey-sur-Ouche, sont accueillis six jeunes de treize à dix-neuf ans en grande difficulté socio-éducative ou judiciaire [3]. La plupart présentent des troubles psychiatriques qui ne nécessitent pas cependant une hospitalisation à plein temps. Comme à l’EPETC de Suresnes, des « incasables » dont le comportement a mis à mal les encadrants.
La structure, ouverte en 2004, est née d’un constat de carence fait par les partenaires (aide sociale à l’enfance, DDASS, PJJ, service de pédopsychiatrie) réunis au sein d’une commission départementale : que faire de ces gosses aux profils très variés (petites déficiences, souffrance psychique, troubles du comportement, parfois à la limite de la délinquance) qui ont en commun de n’avoir leur place nulle part ? La réponse, en forme de pari : réunir en un même lieu une équipe éducative et une équipe thérapeutique pour assurer un suivi conjoint… Ce nouvel établissement, géré par l’association départementale des pupilles de l’enseignement public et financé à 95 % par le conseil général (le reste l’étant par la DDASS et la PJJ), a ouvert en 2004. « L’UET était une coquille vide, raconte son directeur Alain Caron, arrivé après six premiers mois chaotiques. C’était à la direction et au personnel de décider et d’inventer ce qu’ils allaient mettre dedans. »
Au départ, l’unité est conçue sur le même principe que l’EPETC : un lieu d’accueil temporaire (trois mois renouvelables une fois) pour gérer une situation de crise, apaiser le jeune et le rendre ensuite à son foyer d’origine. Mais la comparaison s’arrête là. « Nous nous sommes rapidement aperçus que la crise était plus structurelle que conjoncturelle, explique Alain Caron. Beaucoup ont un parcours fracturé. Leur signifier qu’ils ne sont là que pour quelques mois s’avère trop insécurisant pour eux. » D’autant que la plupart arrivent de psychiatrie ou après exclusion d’un établissement. Désormais, les adolescents restent donc le temps nécessaire, plusieurs années si besoin, pour repartir sur un nouveau projet éducatif. « Mais nous gardons en tête la limite de temps », précise Alain Caron. La moyenne de la durée de séjour se situe autour d’un an.
Le directeur expose ainsi la philosophie du lieu : « Comment réussir à garder ces gamins quand d’autres ont échoué ? Une chose est sûre, ils vont attaquer le cadre pour vérifier s’il est bien solide parce que tout le reste, famille ou foyer, s’est écroulé. Le personnel est préparé à cela, pour rester debout face à l’agressivité. Mais nous ne sommes pas plus forts ou plus malins que les autres. Il fallait par conséquent proposer une nouvelle forme d’accompagnement, surprendre nos pensionnaires en n’ayant pas les réactions auxquels ils s’attendent. »
Ainsi, un passage à l’acte ne va pas être considéré dans le seul rapport à la règle mais analysé comme un symptôme du mal-être. « Pour certains, nous savons que, lorsqu’ils reviennent d’un week-end en famille, ils explosent. » Fugues, scarifications… l’agressivité s’exerce d’abord contre eux-mêmes. En cas de violence, une sanction-réparation réfléchie en fonction de chaque personnalité vient à la fois signifier le mécontentement de l’équipe, et tenter de valoriser le fautif. « Par exemple, si un gamin casse une fenêtre, cela ne sert à rien de le faire payer, il n’a pas d’argent. Alors il va faire une pizza pour le groupe, et montrer son potentiel créateur. Ils ont une très piètre estime d’eux-mêmes. Ils ne font que se punir. »
La pratique peine parfois à rejoindre la théorie. Ainsi, une éducatrice victime d’une agression quelques jours auparavant reconnaît qu’elle l’a subie violemment : « La tension quotidienne, on s’y habitue, ça fait partie de leur mode d’expression. Mais face à cette violence directe, j’ai dû admettre que je ne pouvais plus m’occuper de cette personne pour un temps. »
Les soignants (deux psychologues pour un équivalent temps plein, une infirmière à mi-temps et un psychiatre trois heures par semaine) représentent un soutien essentiel pour les huit éducateurs : ils aident à toujours mettre du sens sur les comportements, en le rapportant à une histoire passée souvent très lourde.
Un bilan mensuel entre le psychologue et les deux référents (l’un imposé, l’autre choisi) revient sur les événements survenus et analyse les actes. Mais les deux équipes, thérapeutique et éducative, échangent aussi au quotidien sur des adolescents qui souvent ne veulent plus entendre parler de psy et sont capables de refuser tout rendez-vous pendant des mois. La thérapie passe alors par les activités de tous les jours, à distance. Tous les supports sont bons pour mettre de la parole, de la pensée. « Ces gamins sont blindés de partout. Il faut qu’ils aient confiance dans les adultes pour baisser un peu le masque, constate Alain Caron. Les ateliers, bois, photo, jeux de rôles… sont l’occasion d’alléger leurs mécanismes de défense. Ils lâchent parfois des éléments sur eux-mêmes, leur histoire ; les éducateurs les transmettent aux psychologues qui les retraduisent en pratique éducative, pour nous aider à avoir la bonne parole, le bon geste. »
« Ici, on ne peut pas se contenter d’attendre dans son bureau, souligne William Skowron, psychologue. Il faut savoir travailler autrement, aller à leur rencontre. Ainsi, un jeune qui avait du mal à venir dans mon bureau même après un long séjour me proposait parfois d’aller fumer une cigarette dans le jardin et me racontait son week-end. » A condition de ne pas recevoir l’un d’entre eux en entretien dans la journée, William Skowron prend certains déjeuners avec la maisonnée. Comme tout le personnel, car le fonctionnement du lieu repose sur le « faire avec ».
Des éducateurs sont présents de 7 heures à 23 heures, 365 jours par an, ils partagent tous les temps de la journée, y compris la préparation du repas le soir lorsque la maîtresse de maison est partie. La plupart des pensionnaires rentrant rarement dans leur famille, les camps de vacances aident aussi à retrouver un lien à l’autre. Lorsque l’on vit ensemble du lever au coucher, on se montre sous son vrai jour ; cela rend les adultes plus accessibles.
Même attention dans le déroulé de la semaine : chacun dispose d’un emploi du temps personnalisé qu’il doit respecter, en fonction de ses activités au sein de l’unité et à l’extérieur (scolarité, apprentissage, ateliers en service psychiatrique, etc.). Cependant, une certaine souplesse est de mise, si telle activité ne peut pas convenir à l’état mental du jeune à un moment donné par exemple. Le personnel s’adapte à chacun, y compris dans les relations avec la famille : on accompagne chez les parents, on permet de les recevoir dans un studio conçu dans l’annexe de la maison…
Le nombre restreint de places autorise cette prise en charge personnalisée, certes, mais elle « dénote aussi d’une volonté », selon William Skowron : « L’équipe est très disponible, y compris les week-ends, elle s’intéresse à ce que font les jeunes. » Ce qui n’est pas mince pour des enfants « très faillés narcissiquement ». Le psychologue se souvient notamment du plaisir immense éprouvé par une adolescente passionnée de chevaux parce qu’un éducateur était allé voir son concours de saut d’obstacles…
La bienveillance paie : petit à petit, les crises reviennent moins fort, moins souvent. Sur les vingt-cinq jeunes passés à l’UET depuis sa création, un seul n’a pu rester, parce qu’il avait agressé une femme du village. Ses troubles étaient trop lourds, il a dû retourner en psychiatrie. À l’inverse, un garçon qui se jetait contre les murs et mangeait les mégots de cigarette à son arrivée est reparti au bout de trois ans (le record…) dans une Mecs (Maison d’enfants à caractère social) avec un contrat d’apprentissage classique. Mais l’évolution est rarement aussi impressionnante, et elle est de toute façon difficilement mesurable. « Tous en tirent un bénéfice, estime William Skowron. La sécurité les fait aller mieux. »
De là à garantir un comportement à la sortie… Le directeur Alain Caron ne s’y risque pas. En revanche, il évoque une des principales difficultés rencontrées à l’UET : les adolescents finissent parfois par s’y sentir comme dans un cocon et ne parviennent plus à en sortir. C’est pourquoi, dès le début, on leur explique qu’ils sont là pour repartir. « On les rassemble psychiquement et géographiquement, on restaure les liens avec les adultes en privilégiant les activités en interne pendant quelques semaines, précise Alain Caron. Puis on refait le chemin inverse : resocialisation, réinscription dans le milieu scolaire ou autre… » Ils se posent ici pour définir un projet, mais l’objectif est qu’ils aillent le réaliser ailleurs. Ce qui n’est pas toujours facile à organiser, les autres établissements ayant tendance à stigmatiser le public de l’UET comme « le pire ». L’équipe de Fleurey doit donc présenter un candidat avec un projet clé en main, prouver qu’il est capable de tenir dans un appartement ou dans un foyer classique.
Etape essentielle, la sortie est organisée pour être valorisante : tu pars non pas parce qu’on ne veut plus de toi mais parce que tu es capable d’autre chose. Fête, discours, diaporama sur les moments forts dans la maison… À l’opposé des départs connus auparavant.
Seule certitude : l’existence de l’UET soulage les dispositifs d’accueil. Au point que l’idée de créer une deuxième unité sur le même modèle en Côte d’Or commence à poindre. Le directeur ne semble pas convaincu de la pertinence d’une petite sœur : « Ne risque-t-on pas, en multipliant l’offre, de saper le travail de tolérance des établissements existants ? »