mardi 29 août 2017

LOI DU 14 MARS 2016 RELATIVE A LA PROTECTION DE L ENFANCE

À l’automne 2014, le Gouvernement a engagé une réforme de la protection de l’enfance, en concertation avec l’ensemble des acteurs : les professionnels, les élus, mais aussi les enfants et les parents concernés. Ces travaux conduits en étroite collaboration avec les départements chargés de cette politique publique ont permis la construction partagée d’une feuille de route pour la protection de l’enfance composée de
 101 actions. Celle-ci s’articule autour de trois grandes orientations :
•••  une meilleure prise en compte des besoins et des droits de l’enfant ;
•••  l’amélioration du repérage et du suivi des situations de maltraitance, de danger ou de risque de danger ;
•••  le développement de la prévention à tous les âges de l’enfance.
La loi du 14 mars 2016 relative à la protection de l’enfant constitue le volet législatif de la feuille de route. D’initiative parlementaire, cette loi est aussi le reflet de la volonté de Laurence Rossignol, ministre des Familles, de l’Enfance et des Droits des femmes, de mobiliser les acteurs concernés et de sortir la protection de l’enfance de l’angle mort des politiques publiques.

 LOI DU 14 MARS 2016  RELATIVE À LA PROTECTION  DE L’ENFANT


Pourquoi une nouvelle loi ?

Les avancées de la loi du 5 mars 2007 La protection de l’enfance a été profondément réformée par la loi du 5 mars 2007 avec trois objectifs : mieux prévenir, mieux repérer et mieux prendre en charge. Le bilan de la mise en œuvre de cette loi en matière de repérage des enfants en danger, réalisé en 2013 par les sénatrices Muguette Dini et Michelle Meunier, témoigne des avancées acquises. Les parlementaires saluent notamment la mise en place par les départements des cellules de recueil, traitement et évaluation des informations préoccupantes (CRIP) et le développement de dispositifs de diversification des modes d’intervention en protection de l’enfance. Mais elles relèvent aussi les difficultés de mise en œuvre de la loi et les axes d’amélioration.
Des progrès à accomplir dans l’intérêt de l’enfant Les constats des sénatrices rejoignent les analyses d’autres rapports récents qui témoignent tous des progrès qui restent à accomplir pour :

 lutter contre les importantes disparités territoriales et le manque de coopération entre les acteurs de la protection de l’enfance ;

 prévenir les situations de maltraitance et mieux protéger les enfants en danger ; ••• 
 éviter les ruptures dans les parcours, notamment en accompagnant les jeunes à la sortie de l’aide sociale à l’enfance ;

 développer la connaissance et l’observation en protection de l’enfance pour accroître les capacités de l’État et des départements à piloter et évaluer l’impact des politiques et dispositifs mis en place depuis 2007.

Une philosophie renouvelée de la protection de l’enfance
Construite à partir d’un socle de valeurs communes tirées de la Convention des droits de l’enfant, la loi du 14 mars 2016 organise un double changement de perspective en affirmant d’une part la nécessité de centrer les interventions sur l’enfant, et d’autre part le rôle de l’État dans la protection des enfants les plus vulnérables. « C’est la Convention des droits de l’enfant qui doit guider nos choix, nous permettre de penser les droits de l’enfant dans la perspective plus large d’un projet de société : l’idée est de construire un environnement bienveillant qui protège et stimule chaque enfant, soutient son développement et son épanouissement. » Laurence Rossignol, Assises du Carrefour national de l’action éducative  en milieu ouvert (CNAEMO), le 23 mars 2016 à Évreux.

Ces avancées se traduisent dès l’article premier de la loi par une nouvelle définition de la protection de l’enfance, centrée sur la prise en compte des besoins de l’enfant.

L’article premier : une philosophie renouvelée de la protection de l’enfance
« La protection de l’enfance vise à garantir la prise en compte des besoins fondamentaux de l’enfant, à soutenir son développement physique, affectif, intellectuel et social et à préserver sa santé, sa sécurité, sa moralité et son éducation, dans le respect de ses droits. « Elle comprend des actions de prévention en faveur de l’enfant et de ses parents, l’organisation du repérage et du traitement des situations de danger ou de risque de danger pour l’enfant ainsi que les décisions administratives et judiciaires prises pour sa protection. Une permanence téléphonique est assurée au sein des services compétents. « Les modalités de mise en œuvre de ces décisions doivent être adaptées à chaque situation et objectivées par des visites impératives au sein des lieux de vie de l’enfant, en sa présence, et s’appuyer sur les ressources de la famille et l’environnement de l’enfant. Elles impliquent la prise en compte des difficultés auxquelles les parents peuvent être confrontés dans l’exercice de leurs responsabilités éducatives et la mise en œuvre d’actions de soutien adaptées en assurant, le cas échéant, une prise en charge partielle ou totale de l’enfant. Dans tous les cas, l’enfant est associé aux décisions qui le concernent selon son degré de maturité. « Ces interventions peuvent également être destinées à des majeurs de moins de vingt et un ans connaissant des difficultés susceptibles de compromettre gravement leur équilibre. « La protection de l’enfance a également pour but de prévenir les difficultés que peuvent rencontrer les mineurs privés temporairement ou définitivement de la protection de leur famille et d’assurer leur prise en charge. […] »
Les deux grands axes de la loi relative à la protection de l’enfant

1.  Mieux prendre en compte les besoins de l’enfant : vers plus de protection et de stabilité dans les parcours de l’enfant et du jeune adulte

2.  Améliorer la gouvernance nationale et locale de protection de l’enfance : pour une politique publique décloisonnée et transversale

1. MIEUX PRENDRE EN COMPTE  LES BESOINS DE L’ENFANT : vers plus de protection et de stabilité  dans les parcours de l’enfant  et du jeune adulte
« Se centrer sur l’enfant, c’est envisager la pluralité de ses besoins, c’est prendre en compte son parcours et les ressources de son environnement. » Laurence Rossignol, Assises du CNAEMO, le 23 mars 2016.
Cette attention portée à l’enfant et les mesures concrètes qui en découlent ne sont évidemment pas contradictoires avec les mesures de soutien aux familles. Au contraire, la meilleure prise en compte des besoins de l’enfant est l’occasion d’une alliance souvent très positive entre les parents et les professionnels.
Développer la prévention à tous les âges de l’enfant La période périnatale est identifiée comme un moment propice où des liens d’attachement forts se développent. C’est dans cette perspective que l’examen prénatal précoce a été inscrit dans le Code de la santé publique (article 31) et que les missions des centres parentaux ont été valorisées dans le Code de l’action sociale et des familles (article 20). Cette loi clarifie aussi le cadre d’intervention de la prévention spécialisée, soulignant ainsi son importance (article 12). Au moment où s’intensifie la lutte contre toutes les formes de décrochage, où de nouvelles menaces pèsent sur les jeunes, les équipes de prévention spécialisée sont une ressource indispensable pour repérer les signes de mal-être et répondre aux besoins des jeunes sur les territoires.
Améliorer le repérage et le suivi des situations de danger  pour pouvoir mieux y répondre La loi prévoit des dispositions contraignantes permettant de clarifier les conditions de saisine de l’autorité judiciaire en l’autorisant dès lors que la gravité de la situation le justifie (article 11) ou encore de fixer un cadre national pour l’évaluation de l’information préoccupante (article 9). Pour améliorer le repérage et le suivi des situations de danger, un médecin référent pour la protection de l’enfance sera aussi désigné dans chaque département pour faciliter les liens entre les professionnels de santé et les services de protection de l’enfance (article 7).
La loi impose par ailleurs une motivation spéciale et un cadre de référence centré sur les besoins de l’enfant pour les visites en présence d’un tiers (article 24). Les retours au domicile des enfants confiés seront aussi mieux encadrés (article 18).
Garantir plus de cohérence et de stabilité dans les parcours des enfants en protection de l’enfance Pour mieux connaître et identifier les besoins et ressources de l’enfant, le contenu du projet pour l’enfant (article 21) et du rapport de situation (article 28) est précisé. Ceux-ci constituent des outils essentiels dans le suivi et l’évaluation des parcours des enfants accompagnés en protection de l’enfance. Dans la même logique, la loi prévoit la révision régulière de la situation des enfants confiés à l’aide sociale à l’enfance, en particulier quand ils sont très jeunes, au travers notamment de la mobilisation des commissions pluridisciplinaires et pluri-institutionnelles (article 26). Il s’agit au travers de diverses dispositions de garantir les regards croisés pour mieux prendre en compte la diversité des situations des enfants accompagnés en protection de l’enfance. La loi ouvre en effet de nouvelles perspectives pour adapter les réponses de protection aux besoins des enfants, par exemple :

 la mobilisation des ressources de leur environnement en sécurisant le recours à des tiers (articles 13 et 30) ;
 
 la prise en compte des situations de délaissement parental pour aménager l’exercice de l’autorité parentale (article 40) ;

•••  la création d’une passerelle entre juge des enfants et juge aux affaires familiales (article 38) ;


 la valorisation du statut de pupille, comme statut protecteur de l’enfant, indépendamment de la construction ou non d’un projet d’adoption (article 34) ;

•••  la sécurisation de l’adoption simple (articles 32-35-36).
Accompagnement vers l’autonomie des jeunes confiés à l’aide sociale  à l’enfance Parmi les ruptures auxquelles sont exposés les enfants confiés à l’aide sociale à l’enfance, celle qu’ils vivent à leur majorité est sans doute l’une des plus violentes. C’est pourquoi la loi du 14 mars 2016 met en place un ensemble de dispositions visant à mieux préparer ces jeunes privés de soutien familial à la transition vers l’âge adulte : •  la construction avec le jeune, dès ses 17 ans, d’un projet d’accès à l’autonomie (article 15) ; •  l a poursuite de l’accompagnement pendant l’année scolaire engagée (article 16) ; •  l’obligation pour le préfet, le président de conseil départemental et les autres acteurs intervenant auprès des jeunes de conclure un protocole pour coordonner leurs interventions autour d’un objectif prioritaire : celui de mieux prendre en compte les besoins des jeunes les plus vulnérables et de favoriser leur accès aux dispositifs de droit commun (article 17) ; •  la constitution d’un pécule versé au jeune à ses 18 ans, constitué par le versement de l’allocation de rentrée scolaire sur un compte à la Caisse des dépôts et consignations (article 19).

2. Améliorer la gouvernance nationale et locale de protection  de l’enfance : pour une politique publique décloisonnée et transversale
«  L’autre changement majeur porté par la loi du 14 mars 2016 tient en effet à la réaffirmation du rôle de l’État en protection de l’enfance, un État partenaire plus qu’un État tutelle, un État garant d’une gouvernance renouvelée. » Laurence Rossignol, Assises du CNAEMO, le 23 mars 2016.
Renforcer le pilotage de la politique de protection de l’enfance  en décloisonnant les interventions À la fois interministérielle et décentralisée, la politique de protection de l’enfance s’appuie sur des logiques partenariales qu’il faut renforcer et faciliter. Les interventions doivent être décloisonnées dès la prévention pour développer une approche concertée des besoins prioritaires sur les territoires, mais aussi pour améliorer l’accompagnement de l’enfant tout au long de son parcours et à la sortie des dispositifs.
Au niveau national, la création d’un Conseil national de la protection de l’enfance (CNPE) permet un meilleur pilotage de la protection de l’enfance en réunissant l’ensemble des acteurs du champ. Ce conseil interministériel placé auprès du Premier ministre propose au Gouvernement les grandes orientations nationales de la protection de l’enfance, formule des avis et évalue la mise en œuvre des orientations retenues. Il donne une réelle impulsion nationale à cette politique et renforce le rôle de l’État en matière de pilotage, d’animation et de régulation (article 1er).
Au niveau local, l’amélioration de la coordination se traduit par exemple par le renforcement de l’information du préfet en cas de dysfonctionnement dans un établissement compromettant la sécurité des enfants accueillis (article 4), ou encore par la mise en place des protocoles départementaux de prévention (article 2).
Développer la recherche pour adapter la politique de protection  de l’enfance à la réalité des situations et soutenir  les professionnels dans leur pratique Afin d’identifier les besoins des enfants et d’examiner les réponses qui y sont apportées à l’échelle nationale, la loi vient renforcer les missions des observatoires : l’Observatoire national de protection de l’enfance – ONPE (article 6) et les observatoires départementaux de la protection de l’enfance – ODPE (article 3). Cette réforme permet de consolider les coordinations stratégiques et de faciliter la diffusion des savoirs sur les terrains au plus près des professionnels au contact des enfants. Les observatoires départementaux ont désormais le soin de réaliser un bilan annuel des formations dispensées auprès des professionnels de la protection de l’enfance (article 3). Des actions sont aussi identifiées dans la feuille de route pour développer les outils à destination des professionnels, développer les liens entre la recherche et les pratiques de terrain, adapter la formation des acteurs et les organisations institutionnelles aux exigences de la protection de l’enfance.

CONCLUSION
La loi du 14 mars 2016 constitue une nouvelle étape dans la réforme de la protection de l’enfance. Fondée sur les constats formulés par les acteurs durant la concertation lancée par la ministre et enrichie d’un long travail parlementaire, elle vient rénover le cadre d’exercice des missions de protection de l’enfance. Consciente que la mise en œuvre de la loi ne peut se faire sans les professionnels concernés, Laurence Rossignol, ministre des Familles, de l’Enfance et des Droits des femmes, souhaite poursuivre le dialogue entamé à l’automne 2014 pour permettre une meilleure protection des enfants sur l’ensemble du territoire. « L’énergie que nous avons mobilisée collectivement pour améliorer les réponses en protection de l’enfance, leur donner plus de visibilité, n’est en fait qu’un volet d’une ambition plus large, directement inspirée de nos engagements internationaux, celle de porter une stratégie nationale en  faveur de l’enfance, fondée sur le respect et la promotion de ses droits. » Laurence Rossignol, Assises du CNAEMO, le 23 mars 2016.

article du magazine LES ECHOS


Protection de l’enfance : la profession en proie au doute



Dix ans après la loi sur la protection de l'enfance, les doutes subsistent chez les professionnels quant à la capacité de notre modèle à assurer l’efficience des réponses apportées. - MEHDI FEDOUACH / AFP





Manque de moyens, prévention insuffisante... dix ans après la loi de 2007 une enquête présentée ce lundi pour les 10e assises nationales met en évidence l'inquiétude des acteurs de terrain.

Là plus qu'ailleurs sans doute, il y a loin de la coupe aux lèvres. Et la bonne volonté n'y fait rien. Dix ans après la loi du 5 mars 2007 réformant la protection de l'enfance en France, c'est l'inquiétude qui domine.


Manque de moyens et de coordination entre partenaires, insuffisances au niveau de la prévention... dans une enquête qui doit être présentée ce lundi après-midi à Paris pour les 10e assises nationales de la protection de l'enfance, l'Observatoire national de l'action sociale (Odas) livre les résultats d'une enquête menée auprès de 2.000 acteurs de terrain  : travailleurs sociaux, personnels administratifs, professions médicales...
Et les conclusions n'incitent guère au satisfecit. L'enquête dresse au contraire un bilan en demi-teinte de cette loi de 2007, , une loi complétée par celle du 14 mars 2016. qui prévoit notamment que les conseils départementaux doivent contribuer à la prise en charge des jeunes migrants isolés par l'Aide sociale à l'enfance.
Le dispostif devait renforcer la prévention, réorganiser les procédures de signalement des situations à risque et diversifier les modes de prise en charge des enfants. "Malgré ces adaptations réglementaires et les efforts constants des professionnels et des institutions, les doutes subsistent sur la capacité de notre modèle à assurer in fine l'efficience des réponses apportées. et les tensions sur le terrain semblent s'amplifier dans un contexte, de surcroît, de plus en plus complexe et imprévisible", lit-on sur le site internet de l'Odas.

Une dépense de 7,3 milliards d'euros pour les départements

Fin 2014 en France, 290.000 mineurs faisaient l'objet d'au moins une mesure de protection de l'enfance (placement en familles d'accueil ou foyers, ou suivi à domicile), selon l'Observatoire national de la protection de l'enfance (ONPE). Le nombre de jeunes majeurs concernés est, lui, estimé à près de 21.500.
Les départements ont consacré l'an dernier 7,3 milliards d'euros à la protection de l'enfance, une enveloppe stable par rapport à 2015. Et ce, malgré le bond d'un quart de la population de mineurs étrangers isolés issus notamment du démantèlement de la « jungle » de Calais. C'est sans doute l'une des raisons pour lesquelles 90% des personnes interrogées par l'Odas déplorent un manque de moyens financiers pour mener à bien leur mission et 54% pensent qu'on n'a pas su s'adapter à la prise en charge croissante des mineurs isolés étrangers ces dernières années.


Dans une note actualisée en juin, l'Observatoire national de l'enfance en danger (Oned, créé en 2004) qui a étudié la période 2007-2014 , souligne de son côté l'existence de grandes disparités départementales pour ce qui concerne la prise en charge en France des mineurs et des majeurs concernés par une mesure de protection de l'enfance.

Du mieux pour le repérage et l'évaluation des situations à risque

Tout n'est pas pour autant négatif. Ainsi, une majorité d'acteurs interrogés pour l'étude présentée ce lundi dit ressentir une amélioration du dispositif en ce qui concerne le repérage et l'évaluation des situations à risque. Ils estiment aussi que les enfants "sont davantage entendus sur les décisions qui les concernent", et que les parents sont davantage impliqués.
Près de 60% des répondants considèrent que "l'intérêt de l'enfant guide davantage les décisions", mais ils ne concluent pas pour autant à une meilleure réponse aux besoins des enfants. Pour ce qui concerne la prévention, 39% estiment qu'il y a eu une régression en la matière, et 27% une stagnation.
Sur le plan de l'organisation, peu d'amélioration dans le travail de coordination entre les acteurs de la protection de l'enfance au sein des départements et les partenaires extérieurs (justice, éducation nationale...). S'ils concèdent une diversification des prises en charge, l'avis des professionnels est qu'il y a encore du travail pour construire des parcours cohérents pour les enfants. Mais il reste bien du chemin à parcourir : plus des deux tiers des personnes interrogées ressentent une stagnation, voire une régression dans ce domaine.
@ogrady99

les professionnels de la protection de l'enfance s inquietent


Une enquête dresse un bilan en demi-teinte du secteur depuis la réforme de 2007. Les acteurs déplorent des lacunes, notamment le manque de moyens.

Modifié le - Publié le | Le Point.fr
Le manque de moyens se fait sentir dans les structures d'accueil des enfants.
Le manque de moyens se fait sentir dans les structures d'accueil des enfants. © MAXPPP

samedi 26 août 2017

bilan du 10 eme anniversaire de la protection de l'enfance juillet 2017

L’heure du bilan 10 ans après la loi de 2007

Date
9 juillet, 2017
Auteur
Gaëlle Guernalec-Levy
Photo/Illustration
Pexels

Les Assises de la Protection de l’Enfance organisées pour la première fois à Paris fêtaient cette année un double anniversaire : leurs dix ans et les dix ans de la loi du 5 mars 2007. D’où cet intitulé volontairement incisif : « L’heure de vérité ».
Ces deux journées ont été l’occasion de présenter l’enquête menée par l’ODAS et le Journal des Acteurs Sociaux auprès de plus de 2000 professionnels dont 60% de travailleurs sociaux, sur le bilan de la loi de 2007. Bilan qui se révèle mitigé et dont le point saillant est une très vive inquiétude des acteurs de la protection de l’enfance. A 88%, les personnes interrogées estiment que les moyens financiers alloués à la protection de l’enfance sont insuffisants et elles sont 79% à se dire inquiètes pour l’avenir du système. D’où peut-être, l’accueil plutôt chaleureux réservé au mouvement des salariés du Maine et Loire, en conflit avec le Conseil Départemental, et qui ont investi pendant près d’une heure la scène du Palais des Congrès au début de la conférence plénière de la deuxième journée.

Des moyens financiers pas si négligeables

L’enquête effectuée auprès des professionnels souligne donc que la question des moyens apparaît comme le gros point noir de la protection de l’enfance aux yeux de ses propres acteurs. Or, ces moyens ne sont pas négligeables. En tous cas d’après Didier Lesueur, directeur général de l’ODAS, qui s’étonne de cette angoisse exprimée par les professionnels. “ En 2016, 7,3 milliards d’euros ont été alloués, soit une très faible augmentation par rapport à 2015. Depuis la décentralisation de 1984, cette dépense a été multipliée par trois en euros constants. Ce qui est intéressant en revanche c’est que la dépense relative aux placements (six milliards d’euros en 2016) a été multipliée par deux en 18 ans. Alors que le nombre d’enfants concernés n’a lui augmenté que de 3% et alors que depuis le rapport Bianco-Lamy en 1980, on mise sur le maintien au domicile. ” Didier Le Sueur explique que les efforts de modernisation et d’humanisation des foyers, le renforcement des droits du salarié en accueil familial, l’émergence de formules novatrices peuvent expliquer en partie ces coûts. Il existe en tous cas « un hiatus entre ces budgets colossaux et la perception des professionnels ».
Pour Jean-Louis Sanchez, directeur délégué de l’ODAS, « ces contradictions sont insupportables ». « On a un milieu ouvert qui progresse alors que la dépense ne progresse pas, des dépenses de placement qui augmentent alors que le nombre d’enfants reste stable. Il faut s’interroger sur de nouveaux mécanismes d’intervention. »

Des progrès en matière de repérage des situations

Cette enquête de l’ODAS a tout de même mis en exergue quelques points de bilan positifs. 61% des personnes interrogées considèrent ainsi que le système a progressé en matière de repérage des situations préoccupantes, ce qui a semblé plutôt faire consensus pendant ces Assises. Pour Gilles Seraphin, directeur de l’ONPE, le dispositif autour de l’information préoccupante avec la généralisation des CRIP a permis une réelle amélioration des pratiques. « Il faut maintenant progresser sur les critères partagés entre CRIP ». Pour Edouard Durand, tout nouveau vice-président du Tribunal de Bobigny, ” l‘information préoccupante ça a été le coup de génie de la loi de mars 2007″. “L’IP a conduit à déculpabiliser les professionnels à qui on confiait une tâche très lourde. Elle permet d’être plus sensible aux signaux faibles de la souffrance des enfants.
Adeline Gouttenoire, présidente de l’Observatoire de la Protection de l’Enfance de Gironde, approuve. « Ca a été la grande évolution qui a permis une augmentation du repérage et un progrès sensible : la protection de l’enfance est désormais l’affaire de tous, elle sort de l’angle mort. En Gironde les IP ont doublé. Le problème c’est dans la suite du processus, au niveau de la prise en charge, qui demande des moyens importants. Les CRIP vont mal. Il faut prendre en compte la pénibilité de leur travail. Ce n’est pas un travail comme un autre. Les professionnels sont touchés dans leur vie de tous les jours. »

L’approche par les besoins fondamentaux, pour construire un référentiel commun

Côté constats positifs, Anne-Sylvie Soudoplatoff, directrice générale du GIP Enfance en danger, estime de son côté que ce texte a permis l’émergence d’études et de recherches qui ont notamment débouché sur la notion de « besoins fondamentaux de l’enfant », véritable changement de paradigme qui doit permettre de « dépasser le clivage avec l’intérêt des parents ». Agnès Buzyn, la Ministre des Solidarités, de la Santé (et de la famille, précise-t-elle), assure dans un discours introductif enregistré plus tôt, qu’elle s’appuiera sur la démarche de consensus sur le sujet « pour en tirer des leçons ». Pour Edouard Durand, le grand apport de cette nouvelle approche, c’est le « besoin de sécurité » qu’une conférence de consensus menée en 2017 a institué en méta besoin. « Il faut maintenant avoir une clinique de l’attachement dans notre boîte à outils, martèle-t-il. Avant, mon curseur c’était souvent « jusqu’à quel point je peux travailler avec les parents ». Cette question n’est pas la bonne. La question importante c’est : l’enfant est-il en sécurité ? Il est très important de nous professionnaliser encore dans ce que nous avons à dire sur les familles. Il faut avoir un cadre moins subjectif de ce que nous avons à rechercher quand nous entrons dans la maison des autres. » Le magistrat insiste aussi sur la « prise en charge du psycho trauma ». « Dès qu’on extraie un enfant d’un contexte violent, il faut pouvoir lui donner des soins adaptés en psycho trauma. »
La garantie des besoins fondamentaux de l’enfant posée par la loi du 14 mars 2016 apparaît aussi comme la possibilité d’enfin s’appuyer sur une « clinique partagée ». C’est en tous la position de Michèle Creoff, vice-présidente du Conseil National de la Protection de l’Enfance. « Enfin on a un concept à partager pour parler avec le juge, le médecin, les travailleurs sociaux, les parents. » Sur l’évaluation des situations, les sondés sont une petite majorité (53%) à estimer qu’elle améliorée depuis 2007.

Une prise en charge pas assez transversale

Les enfants seraient donc mieux repérés, sur des critères plus objectifs. Mais sont-ils pour autant mieux pris en charge ? Deux tiers des professionnels considèrent que la protection de l’enfance a régressé sur le sujet du parcours des enfants. Pour Gilles Seraphin, on note certes « une diversification de l’offre des prestations et des mesures », mais « il reste beaucoup à faire, notamment dans l’analyse des offres ». « Il est nécessaire d’établir une typologie nationale ». Il poursuit : « il faut adapter l’accompagnement au parcours et au projet de l’enfant. Il y a de grandes marges de progrès. Le projet personnalisé pour l’enfant (PPE) est inégalement adopté par les départements. Il faut faire progresser le dispositif d’observation longitudinale en cours, articuler les rapports de situation et l’évaluation avec le PPE, amoindrir les ruptures non choisies et assurer de meilleures sorties pour les jeunes majeurs. » Brigitte Mevel Le Nair, directrice Enfance-Famille du Finistère, estime de son côté que « nos modes de prise en charge restent cloisonnés, on a du mal à faire du transversal. »

Les relations avec les familles toujours compliquées

Quelques 74% d’entre des professionnels ayant répondu au sondage pensent que les liens familiaux de l’enfant sont davantage préservés mais ils ne sont plus que 44% à affirmer que les relations entre les professionnels et les familles se sont améliorées. « Les parents sont plus écoutés, ils participent plus au projet, mais leur avis pas forcément mieux pris en compte, ce qui est un peu contradictoire », résume Brigitte Mevel Le Nair.  Cette contradiction est peut-être assez logique dans la mesure où cette question des liens est l’une des plus sensibles en matière de protection de l’enfance, elle est même presque intrinsèquement paradoxale (protéger un enfant de parents potentiellement dangereux tout en cherchant à maintenir voire renforcer, par principe, les liens familiaux, c’est dès le départ une équation périlleuse), elle est indissociable des questions de prévention et de parcours de l’enfant (abordés ci-dessous) et elle génère depuis longtemps de profonds clivages théoriques. Jusqu’à quel point maintenir un lien ? Jusqu’à quel point faire alliance avec les parents?
Adeline Gouttenoire estime ainsi que le fait de ne pas constater une réelle déjudiciarisation des situations (alors que c’était tout l’objectif de la loi de 2007) n’est pas si grave. « On ne doit pas avoir peur du juge. C’est une étape essentielle. La loi de 2016 a d’ailleurs augmenté la compétence du juge. Ne pas le faire intervenir au prétexte que parents étaient d’accord avec une mesure posait problème. Il faut pourvoir envisager la sortie d’une assistance éducative quand ça ne marche pas, quand le lien avec les parents doit être relâché voire rompu. Or, on n’y arrive pas. Il y a encore des JAF qui maintiennent des visites médiatisées avec des maris violents. Même dans des situations très graves, on ne se prononce pas pour des retraits d’autorité parentale. On a essayé de réformer la déclaration judiciaire d’abandon, de modifier le code civil, sans succès. »
Pour Agnès Buzyn, la Ministre de la Santé, « il n’y pas de contradiction entre protection des enfants et soutien des parents. Au contraire ». Pas de contradiction mais, sur le terrain, un travail de dentelle et d’ajustement permanent.

Consensus sur l’importance de la prévention et de l’accompagnement à la parentalité

Tout le monde s’accorde aujourd’hui sur le fait que la prévention (inscrite en tant que telle dans la loi de 2007) et l’accompagnement à la parentalité, deux objectifs indissociables, doivent faire partie intégrante des missions de la protection de l’enfance. Pour Marie-Paule Martin Blachais, auteure du rapport sur les besoins fondamentaux de l’enfant et directrice de l’école de la protection de l’enfance, « nous savons que plus les intervention de prévention sont précoces et intensives et plus elles sont efficaces ». Didier Lesueur, lui, insiste : « Il faut distinguer la protection de l’enfance et l’Ase. Sinon on ne laisse pas de place à la prévention.» Il en est persuadé, « la prévention a vocation d’agir sur société, il faut créer des liens sociaux ». « Elle doit être l’affaire de toute la société, et ne pas concerner seulement les publics ciblés, les services de PMI ou les services sociaux ».
Jean-Philippe Vinquant, Directeur Général de la cohésion sociale, rebondit sur la question des placements abusifs ou inconsidérés : « on peut vivre comme un échec ces placements évitables. Il y a peut être des interactions entre la détresse sociale, la précarité, les troubles psychiques, les addictions qu’on aurait pu éviter avec de la prévention ». Certainement. Mais Adeline Gouttenoire,elle, constate qu’  « on a baissé le nombre d’entretiens prénatal précoces, et les visites des 3-4 ans en maternelle à cause de la pénurie de médecins ». Le regard des acteurs de la protection de l’enfance est lui aussi assez sévère : seuls 32% estiment que les efforts en matière de prévention ont porté quand 27% trouvent qu’ils ont stagné et 39% qu’ils ont régressé. Didier Lesueur, lui, se demande si cette injonction de prévention n’est pas « incantatoire ». « On fait une confusion, on réduit la question de la protection de l’enfance à ASE. D’où la prégnance du traitement sur la prévention. Le positionnement de la prévention n’est pas réellement accompli. »
Quant à l’accompagnement à la parentalité, il fait particulièrement rire jaune les professionnels du Maine et Loire qui ont pris de force la parole le mardi après-midi : « On se prévaut de faire du soutien à la parentalité quand on ne voit les familles qu’à peine une fois par mois
La question des jeunes majeurs a plusieurs fois été abordée, notamment lors de l’intervention d’Isabelle Fréchon, chargée de recherche (Laboratoire Printemps) et chercheuse associée à l’ined, responsable de l’Étude Elap. « En population générale, l’âge des études s’est allongé, explique-t-elle. Aujourd’hui, à 21 ans, à caractéristiques sociales équivalentes, 74% des jeunes vivent toujours chez leurs parents. Les jeunes placés ont moins de réseau relationnel, ils ont des retards scolaires accumulés. 60% ont redoublé au moins une fois. Donc ils sont en décalage. L’institution au sens large tend à les orienter vers des scolarisations tellement courtes qu’elles ne sont plus concurrentielles. Donc ils pâtissent d’un temps long de recherche d’emploi. » Le cercle vicieux.
Les mineurs non accompagnés se sont vus consacrer un atelier. Au cours duquel les participants ont affirmé qu’ils en avaient « assez d’entendre parler d’invasion puisque ça ne concerne que 12.000 mineurs. » Ces jeunes ont une « soif de vivre très forte ».
En conclusion, Jean-Louis Sanchez, visiblement remué par le mouvement impromptu des salariés du Maine-et-Loire deux heures plus tôt, lâche « avoir vécu un immense paradoxe aujourd’hui ». « Il y a une ambition partagée pour que la protection soit encore meilleure et devienne le fer de lance du développement social. En même temps on sent bien que tout mouvement provoque de la violence, une réaction difficile à maîtriser. Je suis inquiet. La protection de l’enfance va connaître une période de très grands changements avec une rénovation offres de service. Comment faire accompagner des mutations importantes quand il est difficile de trouver un langage commun entre professionnels et politiques ? Nous avons vécu les Assises du paradoxe. »





















vendredi 4 août 2017

la protection de l enfance va mal

Bonjour,
Psychologue dans le cadre de la protection de l'enfance (AEMO, Foyers, Prévention) je ne peux malheureusement que me joindre à vos constats déplorables et témoignages désolants concernant le manque de moyens criant tant dans le secteur social que du côté du médical et ce, pour venir en aide de manière cohérente, ajustée, aux enfants et aux familles en grande souffrance que je rencontre et à qui aucune solution adaptée n'est proposée là où ils en ont besoin et au moment où ils en ont besoin et là où c'est encore possible.
S'accumulent depuis plusieurs années dans les différents lieux où j’interviens des situations inextricables dans lesquelles un simple RDV chez une orthophoniste n’est pas possible (deux ans d’attente durant lesquelles l’enfant va continuer de s’ancrer dans des difficultés d’où il sera plus difficile de l’extraire quand dans une temporalité juste cohérente). Deux CMPP sur les 3 existants dans mon département ont fermé leur liste d’attente après être arrivés à 4 ans d’attente (ce n’est pas une blague ni une exagération de ma part). Les services de pédopsychiatrie oscillent entre 18 mois et 2 années d’attente aussi sur ce même secteur. Imaginez dans un tel contexte ce qu’il se passe quand les plus démunis (dont on s’occupe souvent en protection de l’enfance) loupent un RDV : ils ne sont plus prioritaires et perdent leur place. Un système qui glisse vers ces rigidifications rétorsives parce qu’il est poussé là-dedans, sans aucune souplesse malheureusement (pas du fait des personnes mais du système ! Ces soignants bien souvent n’y peuvent rien !). Et c’est l’enfant qui en pâti tout simplement. Un simple petit coup de pouce lui aurait peut-être permis de relancer sa scolarité, de l’étayer, de soutenir ses parents dans ce recentrage autour de lui… Que sais-je encore ! Là où deux ans plus tard il aura peut-être redoublé (ou pas !) ! Parce que les enfants passent aussi de classe en classe sans orientation adaptée ou étayage suffisant (et diagnostiqué avec finesse et cohérence). 100 places d’IME n’ont pas été trouvées pour des enfants qui en relèvent et ont une notification pour cela. Idem pour les classes ULIS. Je passe sur cette petite fille cette semaine qui m’a bien occupée : « ne relève pas d’une ULIS » car pas considérée comme déficiente, mais qui ne peut prétendre à un maintien non plus en CE1 alors qu’elle n’a pas acquis la moitié d’un niveau de CP. Elle ira en CE2 malgré tout l’an prochain sans avoir de place possible dans le CMPP (dont elle a cruellement besoin) qui n’a même pas pu l’inscrire sur une liste d’attente, et attendra 1 an et demi pour être en pédopsychiatrie (éloigné de son domicile géographiquement avec des parents non véhiculés !!). Sachant que le CMPP était sur sa commune et le lieu le plus adapté à ses difficultés « Psycho-Pédagogiques » (combinant psy et ortho dont elle a besoin). Elle est maintenue dans l'errance.
Les exemples sont les mêmes du côté des lieux de placement : nous accompagnons parfois des familles vers ce chemin douloureux qu’est la séparation d’avec leurs enfants non pas parce que cela nous fait plaisir ou qu’on se débarrasse de la situation mais parce que notre analyse nous permet de penser que cette solution est à mettre au travail, à mettre en œuvre avec la famille (c’est ce qu’on nous demande en plus !). Nous bordons les choses. Nous y mettons du sens pour amortir le vécu douloureux... Or, nous ne trouvons pas les places nécessaires à cette mise en œuvre ajustée : familles d’accueil quand c’est nécessaire pour répondre aux besoins de l’enfant, un petit groupe vertical pour un autre, un foyer éloigné du domicile de la mère (pour créer une séparation réelle et éviter les fugues à répétition…). Tout ça nous l’analysons en amont dans ce qu’on appelle parfois « notre petit laboratoire ». Mais le placement ne peut pas se mettre en œuvre dans une temporalité acceptable, ou tombe à côté du projet. Par conséquent le placement dans une institution (quand il n’y a que ça de possible), une séparation de la fratrie, contre notre gré, où le placement d’un adolescent à côté de chez sa mère ou dans un groupe explosif qui ne va que catalyser ses propres difficultés dument connues tombent à côté. L’enfant s’ancre dans ses difficultés. A un moment donné on n’arrivera plus à avoir d’accroche avec lui, l’espace du travail possible avec certaines familles s’amoindri… Et l’on reproche ensuite aux établissements auxquels on ne donne pas les moyens de fonctionner de manière cohérente (je le répète !) et normale de ne pas être suffisamment protecteurs !! Et là, la boucle est bouclée du cercle infernal où les professionnels sont aussi démunis (ou se vivent comme tels) tout autant que la famille qu’on leur demandait d’aider (et ils ont choisi ce métier pour cela et fait des études pour cela nourrissant le désir d’aider ces personnes). La blessure narcissique et l’épuisement professionnel les guettent (nous guettent). Dans ce contexte nous ne pouvons pas soutenir ces familles, les aider à restaurer un minimum de contenance familiale là où les professionnels eux-mêmes sont impuissants à mettre en œuvre les outils pour lesquels ils ont été formés. Désormais, les TS doivent entrer leurs demandes de placement dans un logiciel froid, distant, sans répondant. Pour optimiser la gestion du flux des boîtes de petits pois cela est sans doute très efficace mais pour les enfants que j’ai nommés précédemment vraiment je ne vois pas ce qu’un logiciel va optimiser !! Ce système abrase la pensée que j’essaie moi-même de faire vivre encore autant que je peux même si la désolation et l’impuissance ne contribuent pas beaucoup au plaisir de penser. C’est pourtant là que l’on trouve encore l’essence de notre travail ou l’essence (en tant que carburant) à mettre dans notre travail !
Je crois très sincèrement que la clinique de ces familles et ces enfants dits « en danger » parle d’elle-même : qu’il suffit de l’écouter et d’y apporter des réponses logiques et cohérentes (qui aient juste du sens parce que je crois que le fond du problème c’est la perte du sens et que c’est ce qui, en partie, met les professionnels en souffrance).
Bien à vous,
Et bon courage à tous.

mardi 1 août 2017

livre

Le 29 juin 2017 | Joël Plantet

Brigade des mineurs

Raynal Pellicer et Titwane


éd. de la Martinière, 208 pages. 29,90 €. | Commander ce livre
On se souvient du succès de Polisse, puissante immersion cinématographique de la réalisatrice Maïwenn – saluée par le Prix du Jury à Cannes en 2011 – dans le quotidien de la brigade de protection des mineurs : auditions de parents maltraitants, gardes à vue de personnes pédophiles, dépositions délicates des enfants… (Lien Social n° 1034). De cet univers ultra sensible et méconnu, les auteurs de ce documentaire graphique ont reçu l’autorisation exceptionnelle de suivre le travail pendant plusieurs mois.
C’est une des brigades spécialisées de la police judiciaire parisienne. 1 600 affaires par an pour 80 enquêteurs. Section « opérationnelle », section « intrafamiliale », et « groupe Internet ». Nombre de travailleurs sociaux la connaissent pour avoir travaillé en partenariat avec elle. Son spectre d’intervention est large : agressions sexuelles, maltraitance, traite des êtres humains, inceste, « bébés secoués », disparitions, viols, prostitution… Ici, en quelques affaires – un recruteur de foot abuseur, la prostitution de jeunes Nigérianes sous l’emprise du vaudou, une situation de maltraitance sur nourrisson, une relation incestueuse, le repérage par Internet de prédateurs sexuels… – le lecteur se voit donner la possibilité d’appréhender la complexité, la finesse, la violence psychologique de ce travail, souvent tout en dentelle. Appuyée par des croquis secs, précis, la retranscription des dialogues et des échanges (pendant les auditions par exemple) donne une valeur ajoutée au propos. Un bel outil documentaire.

lien social

30 juin 2017

Une marche vers Paris pour la protection de l’enfance



Partis d’Angers le 27 juin, des travailleurs sociaux se rendent à pied aux assises de la protection de l’enfance qui se tiennent à Paris les 3 et 4 juillet. Ils marchent contre une politique sociale qui s’intéresse plus au coût de journée qu’à l’impact humain de l’obsession budgétaire. « La protection de l’enfance, c’est protéger, mais aussi travailler les problèmes de fond pour rétablir le lien, aider à se reconstruire et à grandir, ce qui demande du temps, explique une éducatrice spécialisée, l’une des randonneuses contestataires. Si parce que le temps c’est de l’argent, on se contente d’offrir un toit et de la nourriture, ce n’est plus de l’éducatif mais de la mise à l’abri. Et cela ne règle rien. »

actualité du lien social

9 juillet 2017

"Pôle social" : demandez le programme gouvernemental

En l’absence de ministère dédié - sauf pour le handicap -, les acteurs sociaux et médico-sociaux restent dans l’expectative quant à leur devenir pendant ce nouveau quinquennat. Agnès Buzyn, ministre des Solidarités et de la Santé, a toutefois présenté sa feuille de route. Première ambition portant sur la cohésion sociale : lancer une concertation, notamment avec les collectivités territoriales, afin de proposer des réformes d’ici fin 2018 sur les responsabilités de chaque acteur, leurs missions et les financements. Modernisation, innovation et efficacité : voici les trois maîtres-mots du « pôle social du gouvernement ».
Lutte contre les exclusions : objectif prévention
L’accès aux droits devrait être facilité avec l’expérimentation sur certains territoires pilotes d’un « versement social unique ». Conformément aux annonces du premier ministre Edouard Philippe, le minimum vieillesse et l’allocation adulte handicapé (AAH) devraient être augmentés dès 2018. Une relance des politiques d’insertion sociale et professionnelle est également annoncée. Pour les 1,2 million de travailleurs sociaux impliqués dans les politiques de lutte contre l’exclusion, la ministre veut améliorer la formation et moderniser les pratiques professionnelles, notamment sur le plan du numérique et le parcours des usagers.
La famille : un investissement sur l’avenir
Un effort particulier sera fait en direction de la petite enfance, pour soutenir les familles défavorisées dans l’accès aux modes de garde et à l’éducation précoce. Dans le champ de la protection de l’enfance, qui ne cesse de crier son malaise, une stratégie nationale interministérielle entre 2018 et 2022 est annoncée. Elle devrait s’appuyer sur le Conseil national de la protection de l’enfance. La lutte contre les violences faites aux enfants constitue un autre objectif. Concertant le handicap, le dépistage précoce et une prise en charge adaptée seront encouragés, en lien avec la Secrétaire d’Etat chargée des personnes handicapées, Sophie Cluzel.